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La Dimension du sens que nous sommes

DE TOUJOURS : LA FINANCE CONTRE LES PEUPLES

14 Novembre 2011 , Rédigé par texte critique Publié dans #Politique

emprunt-14-18---copie.JPGIl faut cesser de nous faire croire qu’on pourrait moraliser les milieux financiers, mieux, qu’ils pourraient, par eux-mêmes, le vouloir un jour. Déjà, en 1914, la finance dévoilait son seul vrai visage, qui est celui du dividende à tout prix, du bénéfice à n’importe quel prix, celui de millions de morts, par exemple…

Et déjà, à l’époque, l’on évoquait une sorte de fatalité, sans employer le vocable de crise, blanchissant le "drame des finances françaises" tombé de nulle part… Un drame, la belle affaire : de drame, seuls les poilus en vécurent ! La finance, elle, insouciante des hommes, les envoya se faire tuer.

Car l’affreuse saignée de 14-18 fut très largement le fait d’investissements financiers plus que douteux, encouragés par un personnel politique corrompu et un état-major insouciant, n’hésitant pas, à l’exemple du Général Galliéni, à lever la classe 1917 –des adolescents dont certains n’avaient pas 18 ans- et remettant au soir de cette grande victoire de la conscription, le dossier qui le lui avait permis en commandant à ses collaborateur de le "serrer" contre leur poitrine, parce qu’il resservirait bientôt à lever la classe 1918 : les 16, 17 ans…

L’Etat français fit ainsi assumer au peuple français une charge confondante, obérant par sa politique de gabegie au profit des milieux financiers l’avenir même de la nation. Cela, quelques décennies à peine après le désastre de 1870 et la lourde rançon des 5 milliards du traité de Frankfort. La bourgeoisie, dont le règne domina la seconde moitié du XIXème siècle, savait compter sur le soutien inconditionnel de l’Etat pour assurer sa prospérité. Et que lui importait que Paris fut devenue une place financière de seconde zone (les dépôts bancaires y atteignent 5 milliards de francs-or en France à la veille de la guerre, tandis qu’ils atteignent 31 milliards pour l’Angleterre et 29 milliards pour l’Allemagne) : elle a placé tout son argent en valeurs étrangères, par crainte d’une situation intérieure peu sûre, entendez : la classe ouvrière s’y montrait trop rétive devant sa misère…

Alors qu’en réalité, c’était pour d’autres raisons bien sûr : le revenu des valeurs étrangères était de 4,28%, contre 3,21% pour les valeurs françaises… Et en 1914, de 5,74% pour les actions et 4,32% pour les obligations étrangères. Voilà qui explique tout…

Le Temps du 29 avril 1906 en témoigna en ces termes : pour lui, la règle d’or du bourgeois français était de "placer son argent en valeurs étrangères ", parce que cela équivalait à lui "faire franchir la frontière… assurance contre les risques intérieurs grandissants"… (encore une fois : les revendications jugées par trop irresponsables d’une classe ouvrière réduite à la misère…)

A la veille de la Grande Guerre, les capitaux français se mirent ainsi à couler vers l’étranger. Le Crédit Lyonnais avança plus de 300 millions de francs à la Deutsche Bank. La Société Générale, l'Union Parisienne, la Banque de Paris et des Pays-Bas en firent autant. La prospérité du port de Hambourg leur dut tout et, situation cocasse, la Nord-Deutsche Llyod et la Hambourg-Amerika purent ainsi concurrencer avec cet argent nos propres lignes.

Mieux : les capitaux français servir à financer directement l’effort de guerre allemand. Et cela, quand bien même l’Etat pouvait exercer son contrôle sur les emprunts étrangers.

Ainsi, au lendemain d’Agadir, un emprunt d’un milliard failli être émis, à partager entre l’Autriche et la Hongrie. Emprunt explicitement destiné aux armements austro-hongrois. Il ne fut évité que grâce à l’intervention d’un journaliste intègre, l’un des rares, André Cheradame, du Petit Journal, qui le paya de sa carrière.

emprunt-2---copie.JPGOu bien encore : à la veille de lancer son propre emprunt pour la défense nationale, le gouvernement français autorisa deux emprunts turcs – dont les Turcs feront le meilleur usage aux Dardanelles… Mieux, si l’on peut dire : une partie de cet emprunt servie à offrir une ristourne à l’Allemagne, débitrice de la Turquie, de sorte que la France se mit à rembourser littéralement les créances de son ennemi direct…

La même année, alors que l’effort de guerre s’annonçait terrible, l’Etat français consenti à lancer un emprunt bulgare, un emprunt grec et un emprunt chinois…

Les responsabilités politiques, on le voit, furent effarantes. Et tout au long de cette guerre, et ce jusqu’au dernier mois, les gouvernements français ne cessèrent de peser sur les banques françaises pour qu’elles mettent à la disposition des nations étrangères une partie de l’épargne nationale… C’est que le rendement était meilleur… Et tant pis si, on le sait aujourd’hui, ces décisions contribuèrent tragiquement, en 1918, à la prolongation de la guerre… L’or français faisait couler le sang français, ainsi que finit par le constater Le Temps qui, dans son éditorial du 5 août 1918, écrivait : "les Etats étrangers ont, à la veille de la guerre, pris à notre épargne l’argent qui a été refusé à la France pour sa défense"…

Et n’évoquons ici même pas le plus connu de tous ces emprunts, le fameux emprunt russe, si ruineux pour l’épargne française, mais largement encouragé par les banques françaises et la presse à leur solde. La manne française coula ainsi dans un pays pétri de corruption -15 milliards de francs-or pour renflouer les caisses de Nicolas (II)…

Au total, la France aura investi dans cette période (des années 1910 à 1918) plus de 50 milliards en titres étrangers. Dans le même temps, elle ne devait investir que 4 milliards de francs-or dans la totalité de ses colonies, qui lui en rapportait évidemment bien plus… Emigrés en Suisse et en Belgique, ces capitaux français refluèrent en masse vers l’Allemagne…

Qu’on ne nous dise alors pas qu’il serait possible d’introduire de la morale dans une histoire qui ne peut s’avouer qu’immorale. –joël jégouzo--.

 

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