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La Dimension du sens que nous sommes

Recettes d'amour et de meurtre, Sally Andrew

7 Juillet 2017 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #en lisant - en relisant

Afrique du Sud. Un quart des femmes y sont maltraitées. Tous les jours, trois d’entre elles meurent, battues à mort. Maria est l’une de ces femmes. Mais ça a bien fini pour elle : son mari est mort avant de la tuer. En plein Karoo, elle peaufine ses confitures. Cuisiner, sa consolation. «Existe-t-il des plats sur lesquels on peut compter, davantage que sur des amis, des parents ?» Il semble bien que oui, pour peu que l’on veuille être honnête avec soi-même… Maria est une tannie qui aime cuisiner, pour son prochain, pour elle-même. C’est sa manière à elle de porter sans cesse secours au genre humain : lui préparer de bons petits plats. Elle tient du reste une chronique dans le journal local. Hattie, sa meilleure amie, qui dirige la rédaction du journal, lui rend visite justement à ce propos : le magazine veut se passer des recettes pour ouvrir un courrier des lecteurs. Se passer des recettes… Mais c’est toute la vie de Maria, ça ! Comment pourrait-elle s’en passer ? Et se reconvertir dans le conseil aux amoureux, éperdus ou éconduits ? Hattie songe pourtant sérieusement à la recaser là. Et l’une et l’autre entrevoit finalement cette reconversion et le parti qu’on pourrait en tirer : quels meilleurs conseils que proposer des recettes ? C’est décidé. Le courrier prend très vite une place folle au sein de la rédaction. Les lecteurs raffolent des recettes de Maria qui accompagnent ses conseils bienveillants. Elle reçoit tous les jours des tonnes de lettres, dont celle d’une femme, anonyme mais baptisée la femme aux canards quand celle-ci dévoile que son mari vient d’abattre les canards qu’elle chérissait. La femme aux canards redoute de subir le même sort et effectivement, elle disparaît de la circulation. Maria soupçonne aussitôt le mari et s’en épanche à l’enquêteur, pour qui elle nourrit bientôt une vive émotion. La mort de la femme aux canards est emplie de mystères, sur lesquels Maria et Hattie enquêtent. Persuadées tout d’abord que le mari est le coupable. Mais l’affaire se complique. Le récit épouse alors tout à la fois les péripéties des découvertes des deux femmes, parfois au péril de leur vie, et ces petits détails de la vie ordinaire où s’amarrent nos existences. Et tout l’ensemble est composé dans une subtile et nonchalante mise à plat ravivant la matière romanesque jusque dans ces silences des personnages occupés à leurs occupations domestiques. Tout est posé sur le même plan, toutes les porosités, toutes les aspérités, tous les détails d’une vie simple entrecoupées de recettes élégantes. Y compris cette histoire d’amour, la cinquantaine passée, entre Maria et l’inspecteur, qui vient comme fleurir un récit touchant. Le personnage de Maria y prend alors toute sa dimension, immense, même si le mot est trop fort et ne convient en rien à cette humanité qu’il porte, si empreint de grandeur dans sa simplicité.

Recettes d'amour et de meurtre, une enquête de Tannie Maria, Sally Andrew, Flammarion, traduit de l'anglais (Afrique du Sud) par Rose Labourie, juin 2017, 486 pages, 19 euros, ean : 9782081376588.

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Opération Napoléon, Arnaldur Indridoson, livre lu

5 Juillet 2017 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #en lisant - en relisant

1945. Un bombardier allemand s’écrase sur le plus grand glacier d’Europe : le Vatnajökull. Quelques survivants, des officiers allemands bien sûr mais aussi, étrangement, des officiers américains… Une mallette menottée au poignet, un haut gradé allemand entreprend de les sauver tous, avant de disparaître dans les effrois des ténèbres et de la glace… En 1999, le glacier fond. Un satellite repère la carcasse de l’avion qui refait surface. Les forces spéciales américaines déboulent aussitôt. Deux randonneurs les surprennent. L’un des deux contacte sa sœur avant d’être réduit au silence. Elle se lance à son secours, remue ciel et terre pour le sauver. C’est elle l’héroïne du roman. Tenace, émouvante. Elle tente de percer un mystère que les autorités américaines ne veulent pas voir étaler au grand jour. Pourquoi ? De sa voix métallique, Thierry Janssen nous le conte dans une interprétation brillante, incarnant avec force tous les personnages de l’œuvre, passant incroyablement d’un timbre à un autre, de cette voix traînante du vieillard à celle, alerte, de la jeune femme. Incarnant jusqu’aux deux temporalités du récit en infimes nuances, finement, intelligemment, comme il nous en a donné l’habitude. Merveilleux interprète, qui sait jouer de toutes les ruses du comédien pour nous dérouter, nous embarquer quand il le faut dans les fausses pistes du roman. Inquiétant, désinvolte, l’air de rien, ouvrant des passages aux moments clefs.

Opération Napoléon, Arnaldur Indridason, lu par Thierry Janssen, traduit par David Fauquemberg, Audiolib, mars 2017, 1 CD MP3, durée d'écoute : 10h08, 23.40 euros, ean : 9782367623085.

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Le piège de la belle au bois dormant, Mary Higgins Clark, Alafair Burke (livre lu)

4 Juillet 2017 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #en lisant - en relisant

Mary Higgins Clark co-signe de nouveau avec Alafair Burke une seconde enquête de Laurie Moran. Une productrice de télé-réalité, spécialiste du cold-case, a rencontré Casey Carter, qui vient de sortir de prison pour le meurtre de son fiancé et veut prouver son innocence. L’audience de l’émission, s’est-elle persuadée, peut lui être utile. Elle convainc donc la productrice de Suspicion d’en faire sa prochaine  vedette. Le hic, c’est que son fiancé, Hunter, était l’héritier de l’une des plus grosses fortunes d’Amérique et que la famille n’aime guère cette publicité qui va lui être faite… Machinations, jalousies, rivalités, Casey se voit précipitée dans un enfer qu’elle n’imaginait pas. Marcha Van Boven lit ce roman d’une voix souvent basse, grave, parfois comme confiée au creux de votre oreille, à d’autres moments précipitant son débit comme pour sortir au plus vite de ce sac de nœuds…  Prenant pour ainsi dire ses distances, elle mâche ses mots, joue avec les figures de style, les expressions toutes faites qui font entrer la vindicte dans le récit. Elle délie alors, s’amuse des afféteries de la langue, contient leur doucereux examen du monde. Et dans cette manière de tenir à distance le sentencieux, exhibe la distance de celle qui n’est pas dupe, pour évoquer une innocente qui ne l’est peut-être pas, jouant avec saveur de cette méfiance où notre écoute est tenue en haleine.

Le piège de la belle au bois dormant, Mary Higgins Clark, Alafair Burke, lu par Marcha Van Boven, Audiolib, traduit par Anne Damour, mars 2017, 1 CD MP3, durée d'écoute : 8h49, 22.90 euros, ean : 9782367623023.

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Ne lâche pas ma main, Michel Bussi, livre lu par Taric Mehoui

3 Juillet 2017 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #en lisant - en relisant

La Réunion. Une famille heureuse. Farniente. Sauf que la femme disparaît. Et que le mari s’enfuit avec leur gosse. Le plan Papangue est déclenché. Alerte enlèvement de mineur. La Réunion dans tous les sens. Ici, là, ici et là, dans un décor de rêve qui a tourné au cauchemar… Trop de témoins confortent la thèse du crime passionnel. Trop d’indices, d’empreintes de sang laissées au sol. La capitaine Aja Purvi est lancée sur les traces du mari. Avec une volonté d’autant plus affirmée qu’elle veut prouver au chef ses capacités. La traque s’organise. Troublée : l’homme semble connaître la Réunion  comme sa poche! Curieux touriste… La narration s’emballe. Tour à tour, les protagonistes de l’affaire poussent l’un après l’autre le récit, se croisant pour laisser remonter de plus sombres affaires, des affaires non réglées entre les élus locaux par exemple. Pourquoi ce meurtre ? Ces meurtres ? Est-ce un tel, finit-on par soupçonner, avant de se rabattre sur tel autre… Qui brouille les pistes ? L’auteur prend un malin plaisir à nous lâcher au bon moment assez d’indices retors pour nous laisser nous fourvoyer tout seuls… Qui est mort au final ? Où ? L’occasion d’une formidable leçon de cartographie, la science même du récit ! D’un récit lu d’une voix très légèrement nasillarde par Taric Mehoui, qui dévale le texte avec une fougue incroyable ! Barrages, hélicos, il rend cette chasse à l’homme palpable, claque les faits pour qu’ils nous rentrent dans la tête et n’en sortent plus. Taric Mehoui affirme, se reprend, affirme encore, interprétant avec une intimité toute personnelle ses personnages, cherchant à construire avec soin leurs émotions, celle de Martial tout particulièrement, le mari, suspecté du meurtre de sa femme. Martial défait, suppliant, hésitant. Taric Mehoui cavale, implacable, donnant sans cesse du rythme à un texte qui en avait déjà assez pour qu’on ne lâche pas une minute l’écoute qu’il propose.

Ne Lâche pas ma main, de Michel Bussi, lu par Taric Mehoui, Audiolib, avril 2017, 1 CD MP3, durée d'écoute 9h44, 22.90 euros, ean : 9782367621104.

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Fin de ronde, de Stephen King, lu par Antoine Tomé

1 Juillet 2017 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #en lisant - en relisant

Chambre 217, service des traumatismes crâniens. Brady Hartsfield vient de se réveiller. L’auteur du massacre à la Mercedes. Il vient de passer cinq ans dans le coma. Les médecins n’en reviennent pas. Bill Hodges est lui aussi de nouveau tiré de son sommeil pour enquêter sur une affaire en lien avec les meurtres de Brady. Alors ce n’est pas simplement l’affaire et son meurtrier qui se réveillent, mais la terreur qui s’en est suivie, jamais définitivement chassée, d’autant que cette fois, Brady veut étendre sa vengeance à toute la ville. Car Brady est bien vivant. Plein de haine. Et de ressources. Dernier volet de la trilogie débutée avec Mr Mercedes, poursuivie avec Carnets Noirs, Stephen King signe un texte tout en rupture avec les deux précédents, cédant à la tentation du fantastique : Brady tuera depuis son lit d’hôpital… Bon... la fin de la trilogie déçoit. Fin de ronde littéraire... Fin de cycle... Reste cette fin de vie, celle De Bill, trop vieux pour supporter ce monde. Et puis surtout, cette lecture lente d'Antoine Tomé, sur un ton souvent neutre, comme pour exagérer la solitude d'un texte qui se sait (mal) clore une brillante saga. De très nombreuses descriptions lui en offrent l’occasion. Il flâne, pose sa voix, avant de rompre par le ton et le style dans ces dialogues où la raillerie et le cynisme l’emportent pour convoquer cet univers de limbes où King voulait nous engager.

Fin de ronde, livre lu par Antoine Tomé, de Stephen King, traduction de Océane Bies et Nadine Gassie (de l'américain), Audiolib, 2 CD MP3, durée totale d'écoute : 14h03, 24.90 euros, ean : 9782367623078.

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