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La Dimension du sens que nous sommes

Le Parti pris des animaux, Jean-Christophe Bailly

16 Décembre 2024 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #essai, #essais

Les éditions Christian Bourgois publient un recueils d'articles divers, de conférences, etc., de J.-C. Bailly autour de la question animale, prononcés ou publiés entre 2003 et 20011. Intéressant. En ce sens que proches de nous, ils paraissent aujourd'hui datés. Comme si la philosophie n'avait plus grand chose à nous dire de nouveau sur le sujet aujourd'hui. Comme si elle marquait le pas. Les références convoquées par Bailly s'enracinent toutes dans un lointain passé philosophique, des grecs anciens à Heidegger, en passant par Herder et son essai de 1712 sur l'origine des langues, enracinant cette expérience dans le surgissement des verbes plutôt que des noms. Mimer les choses avant de les nommer. Mais y aurait-il là une piste pour comprendre pourquoi les animaux « ne parlent pas » ? Des ponctuations de pensée qui au final ne nous apprennent rien. Alors peut-être que la philosophie a de nouveau beaucoup de chemin à parcourir et de concepts à créer pour tenter de rendre compte de la question animale, telle qu'elle se pose à nous aujourd'hui. Car sur ce point, les découvertes de l'éthologie et des disciplines environnementales semblent de loin plus prometteuses.

Bien sûr, il y a la langue de Bailly dans laquelle entre beaucoup de poésie pour nous la rendre agréable. Placée ici sous le couvert de Ponge et de son Parti pris des choses. De quoi enrichir ce qui ne cède pas devant les trop vieux concepts déployés.

Curieusement à ce propos, c'est toujours le vieux topos du silence des bêtes qui anime la réflexion de Bailly. Ce, à l'heure où l'on commence à déchiffrer les syntaxes des animaux. Les bruits qu'ils font avec leurs bouches, mais aussi avec toutes les autres parties de leur corps, ou avec ces outils qu'ils sont nombreux, finalement, beaucoup plus qu'on ne l'imaginait, à utiliser. Celles des singes bien sûr, auxquels on songe toujours trop tôt tant ils nous ressemblent... Nous savons bien que non seulement ils sont capables d'apprendre le langage des signes, mais de l'enrichir de mots nouveaux. Mais sans doute savons-nous moins que des chercheurs dénombrent et codifient déjà d'autres syntaxes animales, des cétacés aux mésanges, infiniment bavardes... « Les animaux conjuguent les verbes en silence », nous dit Bailly, pour reprendre Herder qui voyait dans l'usage du verbe les origines du langage humain. N'est-ce pas toujours en référer au langage articulé et assimiler la possibilité de penser à son usage ? Quid de ce fameux silence des bêtes ? Beaucoup de silence donc, dans la démarche de Bailly. Mais beaucoup d'alertes également et le lire, ou le relire, c'est ainsi d'abord s'étonner du chemin parcouru sur la question animale. Et pour commencer, cette réflexion nous invite à ignorer l'idée selon laquelle la nature serait immédiate à elle-même. Car tout, dans la nature, des tactiques de chasse des lionnes qui souvent échouent, à celles des arbres pour échapper aux pandémies, nous montre que l'immanence est décidément un concept bien mal fichu.

 

Jean-Christophe Bailly, Le Parti pris des animaux, éditions Christian Bourgois, avril 2024, 150 pages, 7,80 euros, ean : 9782267049138.

 

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