Cannes ? Non : rencontrer Antoine Duhamel, compositeur au cinéma (1/4)
18 Mai 2012 , Rédigé par texte critique Publié dans #entretiens-portraits
"Le cinéma? un art de l’écriture…"
(Antoine Duhamel)
Le Festival de Cannes… Prix et nominations… La gloire… Les honneurs, Antoine Duhamel les a connus. Dans l’horizon du cinéma bien sûr, pour ses orchestrations de Ridicules, Que la Fête commence ou Laissez-passer. Les honneurs, il les a reçus plus sûrement encore de la Cinémathèque française, à travers le prix Henri Langlois par exemple (2008), et plus radicalement sans doute, à travers l’hommage que celle-ci lui a rendu ou la réputation de l’école nationale de musique de Villeurbanne qu’il fonda en 1980. Des honneurs qu’il a toujours accueilli sereinement et qui jamais ne l’ont détourné de l’essentiel : être présent à soi-même, dans toute rencontre humaine comme dans toute aventure artistique.
J’ai rencontré Antoine Duhamel il y a quelques années, très simplement. Et c’est très simplement qu’il m’a proposé un jour de me composer son histoire du cinéma, non pour l’enfermer dans quelque hagiographie imbécile ni moins encore dans un article de revue que j’aurais vendu à tel magazine en vue, mais pour la partager sans façon, pour rien, juste pour cette passion d'un partage généreux et gratuit.
Il est ainsi venu un matin avec une grosse sacoche de cuir dont il a tiré des liasses de documents, des DVD, des Cd-rom, quelques cassettes audio, des livrets de musique et de très vieux films dont plus personne ne parle.
Compositeur de musique, Antoine Duhamel est né en 1925 et s’est fait connaître essentiellement pour ses compositions musicales qui ont commencé par accompagner les films de la Nouvelle Vague. Fils de Georges Duhamel, il composa dès l’âge de 16 ans. Et c’est de cela qu’il veut d’abord parler, narrant sa biographie avec la sagesse d’un homme simple, évident, sûr de son engagement. A l’époque, me dit-il, on comptait en France une douzaine de compositeurs de renom. Il fréquentait alors les élèves d’Olivier Messiaen, dont Pierre Boulez. Il ne suivit pourtant pas leur voie : le cinéma le passionnait. "J’avais 19 ans en 1944, je découvrais le cinéma, c’était un tel choc !" Il fréquentait alors les cinémas de quartier, avant que sa vie ne s’accélère en 44, quand il rentra à Paris, intégra le lycée Condorcet et prit sa carte à la cinémathèque. Il me rappelle l’expérience fantastique que fut pour lui la projection du Nosferatu de Murnau (1922), devant une salle écroulée de rires.
Il fit bientôt la connaissance de Resnay, qui tournait un film sur Hans Hartung. Duhamel souhaitait composer la musique du film, mais faute d’argent, Resnay déclina la proposition. Dans une digression dont il a le secret, portée par la passion de celui qui a des choses à dire plus que par la volubilité de celui qui aime parler, il avoue alors que cette expérience le conduisit toute sa vie à rester méfiant face aux dangers que peut courir le cinéma de création lorsqu’il cherche à emprunter le même chemin que ces productions aux moyens très lourds –ce qui n’était pas vraiment le cas du premier film de Resnay bien sûr, mais qui pourtant s’annonçait dans leurs conversations, lui laissant entrevoir les écueils d’une économie capable de soumettre le parti pris esthétique aux contraintes budgétaires.
Déjà conscient de ses moyens, comme ceux du cinéma, qu'il définissait alors comme un art de l’écriture, plutôt que du spectacle.
Newsletter
Abonnez-vous pour être averti des nouveaux articles publiés.
Pages
Catégories
- 512 Politique
- 494 en lisant - en relisant
- 297 essais
- 128 poésie
- 77 IDENTITé(S)
- 68 LITTERATURE
- 66 entretiens-portraits
- 55 essai
- 53 DE L'IMAGE
- 36 Amour - Amitié
- 16 théâtre
- 2 danse