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21 mai 2011 6 21 /05 /mai /2011 05:53

statue-emballage.jpgNotre mémoire collective est devenue anhistorique, malgré le repeuplement trivial de ces devoirs dont nous avons entassés pêle-mêle les injonctions.

Elle l’est devenue parce que l’homme contemporain ne peut que refuser l’Histoire : sa soif du seul réel qui fasse signe dans son univers, la fiction de soi, est trop grande pour qu’il accepte de se prendre encore au jeu de l’Histoire des hommes. Un jeu dont il ne peut que se méfier au demeurant car il pourrait, sait-on jamais, le plonger dans la terreur de perdre, comme story s’entend, cette histoire de soi dont il a fini par croire qu’elle était la seule vraie Histoire en marche, la seule dont il fallait attendre quelque chose, un storyboard qu’il protège âprement contre le style par trop envahissant de l’Histoire, ce trop plein de sens tout juste acceptable dans sa forme de spectacle.

Mais ce comportement ne traduit que l’effort désespéré qui l’anime pour ne pas perdre le contact avec soi.

L’homme moderne croit vivre au cœur du réel en imaginant qu’il en est la seule réalité. Une réalité qui abolit l’idée que les événements historiques puissent revêtir une quelconque valeur en eux-mêmes. Car seule cette réalité peut donner voix à l’identité qu’il magnifie en lui.

L’Histoire ne peut ainsi plus être vécu que sous la forme d’une épiphanie de soi. Mais parce que nous avons oublié que le monde était resté plus grand que nous et que parfois l’Histoire pouvait faire irruption dans son indécidable vérité, celle-ci est devenue pour chacun d’entre nous un terrifiant dialogue avec l’Autre. Entre l’Histoire et nos vies s’est ouvert en définitive un abîme, une rupture radicale de continuité. Nous ne pouvons y croire. Nous ne voulons pas y croire. Quel pourrait être le sens de l’Histoire au demeurant, en dehors de Soi ? Mais en attendant l’apocalypse, la sienne, celle de sa mort individuelle s’entend, dénombrée dans l’un comme perdition du tout, l’homme contemporain n’a pas réussi à démontrer qu’il était au dessus du sens. Etre sa propre cause ouvre ainsi plus que jamais au retour du plus effroyable sens qui soit : celui de ne plus vouloir faire sens commun. --joël jégouzo-

 

image : un emballage de Christo.

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