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La Dimension du sens que nous sommes

Débutants, Catherine Blondeau

10 Mai 2020 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #en lisant - en relisant

La Dordogne et ses 600 figures pariétales. Nelson Tumelo, un archéologue de réputation mondiale, Zoulou par sa mère, Sotho par son père, y débarque pour participer à un important congrès. A peine a-t-il posé le pied sur le sol français, qu'il se rappelle sa scolarité puis ses études, accomplies en France. Sa conférence portera sur les Magdaléniens qui peuplaient cette région, entre -16 000 et -10 000. Une culture qui culminera à Lascaux. Nelson en dresse le portrait admiratif. Des hommes qui savaient prendre soin des leurs. Comparés à eux, sur ce plan là, nous ne sommes que des débutants. Nelson évoque cette science qui l'a tant passionnée, mais qui jusqu'au XXème siècle, aura été dominée par des blancs. Il invoque Breuil et sa chaire au Collège de France. Breuil imbibé d'idéologie coloniale, hiérarchisant les «races». Une réflexion émaillée de ses souvenirs du ghetto de Soweto, des émeutes, des répressions féroces qui leur succédaient. Mêlant sa réflexion à ses méditations sur la disparition de Néandertal. Néandertal l'Européen, quand Sapiens était l'Africain. A front renversé, les anthropologues du XIXème louaient Sapiens en qui ils voulaient voir leur ancêtre cultivé, enfermant Néandertal dans le paradigme colonial du primitif. Nelson fait alors scandale quand, dans le musée reconstituant la longue histoire de l'humanité, il exige que Sapiens soit représenté en «noir». Un ami le rejoint, Peter, curieux personnage dont on comprend au fond vite qu'il n'est là que pour servir l'axe paradigmatique de la fiction : son immense culture, sa dévotion devant la littérature française, Le Clézio, Duras et toute la haute culture, avec Schönberg par exemple, Fanon, Césaire, Diop... Engagée. A tout prendre... A travers lui, c'est tout un héritage cultivé que l'auteur entend faire remonter. D'autres personnages surgissent pour enrichir l'intrigue. Mais Nelson reste, avec Peter et Magda, le pivot d'un récit qui n'a pour seul but semble-t-il, que de convoquer ce long recouvrement de notre conscience historique, des années 1980 à nos jours. A Bergerac. Devenue une sorte de berceau symbolique d'une nouvelle humanité où se seraient entrecroisées les mémoires de cette histoire mondiale récente : le Sida et les années Thatcher, l'apartheid et la colonisation, la Pologne et le nazisme, jusqu'aux banlieues en feu. Mais avec pour horizon d'attente, le meurtre d'une femme juive. Magda.

Débutants, Catherine Blondeau, éditions Mémoire d'encrier, novembre 2019, 556 pages, 25 euros, ean : 9782-897126483.

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