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29 juin 2017 4 29 /06 /juin /2017 08:22

Le Mexique. Le Vieux est en train de mourir. Il le sait, mais ne veut pas le réaliser. Ses gardes du corps font taire l’augure. L’histoire du vieux donc, patron d’un grand quotidien national, corrompu jusqu’à la moelle. Qui n’aime pas la vue des cadavres, depuis qu’il a vu celui de sa mère. Il a fait revenir son fils à ses côtés. Le gamin avait fait de vagues études de médecine, avant de se spécialiser comme cascadeur, puis figurant, spécialiste de la figuration de cadavres au cinéma… Ce qui nous vaut de somptueuses méditations sur l’identité du cadavre, ses façons d’être si l’on peut oser, dans le sur-jeu bien trop souvent à son goût d’acteur, à vouloir signer sa mort comme un manifeste. Des cadavres qu’il a longuement observés, étudiés, lui. Et dont il est convaincu que très peu d’entre eux supportent la destruction d’une mort violente. Son père peut-être. Qui ferait un bon cadavre. Il y est prêt, quoiqu’il en pense. Même s’il s’évertue à faire encore exécuter tous ceux qui voudraient hâter sa fin. Le fils donc, narrateur éhonté de l’histoire. Posant un regard las sur le monde dans lequel il a grandi entouré d’une nuée de gardes du corps. Dont Milady, sa belle-mère, nymphomane cinglée qui s’accroche à ses plaisirs comme un noyé à la dernière branche d’arbre empoignée. Le fil rouge ? L’anéantissement d’une brigade de police. Ici l’avant-dernier opus d’une trilogie dont l’auteur a fini par écrire cinq volumes. Un roman qu’on peut lire sans avoir lu les autres, tant ce sont les personnages secondaires qui, comme pour les autres volumes, prévalent. Attachants. Le fils, Milady. Dans les autres un boxeur, une prostituée, une logeuse, des chauffeurs, tout ce petit monde Olivados de Bunuel, qui vivait naguère dans la périphérie de Mexico et n’a dû qu’à leurs mensonges de fréquenter les grands d’un monde corrompu jusqu’à l’os. Avec bien sûr en toile de fond le Mexique exsangue. Le Mexique en guerre. Contre les narcotrafiquants. Contre la corruption ou plutôt, par la corruption qui ne cesse de déferler sur une société livide. Un cadavre, cette société mexicaine. Embarquée dans une fin tragique. La presse, les politiciens, la police, tous pourris pour le coup, leur pouvoir de mort dressé contre tous et tout. Les balles sifflent donc. Les meurtres. Noir c'est noir. Humour grinçant, récit brutal. Sans issue, sinon celle que se promet le fils : que tout meurt autour de lui pour qu'il puisse s'en aller. Cesser d'observer cette société au travail de s'engloutir. S'il est possible, car dans un monde où tous tentent d'échapper à une mort violente, il y a peu d'espoir de n'être pas à son tour happé par une fin barbare...

Le Directeur n’aime pas les cadavres, Rafael Menjivar Ochoa, traduit de l’espagnol (Salavdor) par Thierry Dovo, Quidam éditeur, mars 2016, 164 pages, 17 euros, ean : 9782374910611.

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