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20 septembre 2011 2 20 /09 /septembre /2011 06:43

pena-ruiz.jpgQu’est-ce que la laïcité, quelles en sont les raisons historiques, les principes philosophiques ainsi que les traductions juridiques, pour l’Etat, l’école et la société ? Henri Pena-Ruiz, professeur de philosophie, s’est attaché à nous l’expliquer en quelques propositions claires, comme volonté de la République de ne pas distinguer les personnes entre elles. La laïcité, commente-t-il, fonde notre cadre politique sur trois principes indissociables qui ne visent à rien moins qu’unir les êtres humains et les faire vivre ensemble de la façon la plus juste qui soit. Premier de ces principes, celui de la liberté de conscience, nécessairement articulé au principe d’égalité des droits de tous les citoyens, quelles que soient leurs convictions spirituelles, principe auquel la Puissance Publique assujettit sa vocation : l’Etat, qui est la communauté de droit de tous les citoyens, n’est dans son rôle que lorsqu’il vise l’intérêt commun et non l’intérêt particulier de certains.

On comprend bien ce que pointe Henri Pena-Ruiz, qui dans l’Histoire de notre pays s’est construit non sans tumulte comme la garantie d’un fonctionnement plus juste de la Puissance Publique. Mais si l’on comprend le sens historique de ce combat, en revanche, là où le philosophe peine, c’est à sortir de l’approche historico-philosophique pour nous expliquer en quoi, aujourd’hui, la défense de la laïcité telle qu’elle s’est formulée dans les Lois récentes, s’avérait nécessaire… Définir en outre, comme le fait Henri Pena-Ruiz, notre époque comme celle des crispations communautaristes, en en rejetant la faute sur ces minorités visibles tellement dérangeantes aujourd’hui, paraît pour le moins problématique : c’est la question de l’inégalité républicaine du traitement des personnes, dans les faits et non dans les principes, qui a mobilisé ces minorités, naguère escamotées non seulement de l’espace public, mais du Droit Républicain ! Les propos sur la défense de la laïcité s’avèrent ainsi biaisés : les lois récentes ne visaient en réalité pas à défendre la laïcité, mais à stigmatiser des populations, à distinguer, à différencier, c’est-à-dire à produire exactement l’inverse de ce que l’on énonce ici concernant ce soit disant idéal républicain construit trop théoriquement pour être honnête. Certes, il est bon d’avoir des principes et à ce niveau, on ne trouvera pas grand chose à redire. C’est enfoncer des portes ouvertes et convoquer sans nouveau frais l’Histoire. Au mieux, une piqûre de rappel, peut-être utile, mais pas vraiment nécessaire : nul ne songe sérieusement à confessionnaliser l’Etat français, et moins encore ses nations… Cela posé, dire que la Puissance Publique ne peut s’assujettir à la croyance des uns ne peut être suffisant : la Puissance Publique construit des croyances convenables, des pratiques du moins, qu’elle exhibe sans pudeur en stigmatisant d’autres pratiques comme incultes, sinon barbares. Henri Pena-Ruiz n’est ainsi plus à sa place quand il évoque le voile comme le symbole de l’oppression féminine… On connaît assez cette rhétorique et ses effets dévastateurs pour ne pas y sacrifier de nouveau.joël jégouzo--.

 

La Laïcité, Histoire d’un fondement de la République, Henri Pena-Ruiz, éd. Frémeaux et associés, août 2011 Collection Lectures, 1 cd-rom, ean : 356-1302535128.

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