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9 février 2021 2 09 /02 /février /2021 11:11

2020, delta du Niger, au long de la route des oléoducs. Un delta sauvagement pollué. Le pétrole, les réfugiés barbotant dans cette gadoue huileuse, Amnesty et Solal, la quarantaine, qui doit récupérer une française. L’eau des puits est empoisonnée par des métaux lourds. Delta du Niger, le premier endroit au monde où la vie a totalement disparu. Le coût du pétrole. Qui s’actualise en charniers où l’on précipite hommes, femmes, enfants. Des gosses. Beaucoup de gosses. Et ceux qui ne meurent pas violés, torturés, massacrés, meurent de saturnisme. Solal, un flic, un dur à cuire pourtant, n’en revient pas de tant d’inhumanité. C’est là sans doute que sa conscience s’est forgée. Dans ce foutoir qu’est devenu le monde, le PDG de Total est kidnappé. Prisonnier climatique. Le premier. Le ravisseur demande une rançon de 20 milliards de dollars. Non pour lui : pour sauver la planète et faire payer à Total son cynisme et ses crimes, la firme ayant acté un réchauffement climatique supportable pour les pays occidentaux, mortel pour les autres. Mais Total préfère changer de PDG plutôt que de se séparer de 20 milliards de dollars. Ailleurs, la vie néolibérale suit son cours : dans le Pacifique Nord, un sous-marin nucléaire d’attaque mime un exercice de combat dans une zone gangrénée par les milliards de tonnes de déchets plastiques qui polluent les océans. A République, une manifestation climatique est sauvagement réprimée. Police partout, justice nulle part. Mais dans les rangs de la police, certains songent qu’ils en ont assez de jouer les pompiers d’un pouvoir aussi grotesque que despotique. Ailleurs toujours, l’action Total dévisse en bourse et le terroriste qui a enlevé le PDG de Total s’attire la sympathie de la moitié des français, à l’heure même où Macron autorise de nouveau le glyphosate à empoisonner nos sols. On en est là. En effet. Avec un peuple incroyablement mature, conscient du peu qu’il nous reste à jouer pour sauver l’humanité, alors qu’au train où vont les pollutions, dans 30 ans, 5 milliards d’êtres humains seront exposés au péril d’un climat complètement déréglé par la faute de quelques-uns. Qu’il crève donc, le PDG de Total ! Ce qu’il fait du reste, supplanté dans l’actualité par un second enlèvement, celui de la Dir’Cab de la Société Générale cette fois, la banque française qui continue d’investir dans les énergies fossiles au mépris de notre avenir commun. Quel roman ! Qui déroule la conscience implacable de notre situation historique ! Quelle lucidité, jusqu’au procès du terroriste, si finement argumenté, passant au crible l’idée de Justice, de ses prolégomènes philosophiques à ses aboutissants historiques, pour nous aider à mieux en penser les raisons. Quel récit, si pleinement documenté, embrassant avec force le monde dans ses états fébriles et ses embrasements, les peuples réveillés, acculés pourtant par des gouvernements désormais illégitimes, partout, à se taire alors qu’ils portent déjà une Loi nouvelle, une espérance nouvelle, si cruellement bafouée partout. Pessimiste pourtant, quant à nos chances de changer quoi que ce soit, sinon en faisant sécession à notre tour pour œuvrer localement à notre survie –après tout, les riches n’ont –ils pas fait déjà sécession, déchargés qu'ils sont de la survie de l’humanité, recroquevillés dans leurs bunkers qu'ils enterrent partout pour se sauver de cette mise à mort du monde qu’ils ont ordonnée et même pas ordonnée, tant nos élites sont devenues irresponsables à contenter leur énorme bêtise à front de taureau !

Olivier Norek, Impact, éd. Michel Lafon, octobre 2020, 348 pages, 19.95 euros, ean : 9782749938646.

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