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14 juin 2012 4 14 /06 /juin /2012 04:41

indignésRappelons tout d'abord que ce qui est fondamental, dans les démocraties "modernes", c’est la fonction d’opposition.

Quant à l'opinion publique, elle est d'abord la forme prise en France par la nécessité de sauver les thèmes d’une opposition politique capable de garantir la démocratie. On peut en déplorer la construction, les égarements, reste une réelle maturité politique d'une opinion publique moins sotte qu'on ne l'imagine. Même si la fabrique de l'opinion publique, elle, masque les mouvements sociaux, qui sont les minorités morales qui instruisent ces thèmes. Masques trouvant leur raison d'être dans cet effet de filtre qu'exercent les médias, un vrai pouvoir politique capable de les laisser s'épanouir ou de les étouffer pour renforcer la puissance publique aux dépens de la société, comme il en va bien souvent en France.
Car les grands médias français ne comprennent qu’une dimension du politique, celle selon laquelle c’est dans l’Etat que le politique se concentre.
Or s’il est vrai que la politique est orientée vers l’Etat, elle ne peut s’y dissoudre.
En outre, le thème qui décline cette conception de la politique, celui de la légitimité, si souvent repris par les politiciens et leurs commentateurs, est non seulement mauvais mais dangereux, car il réduit de fait la complexité du débat politique.
L’opinion publique est l’expression instrumentalisée d’un tel débat, en réalité porté dans son intégrité et son intégralité par les minorités morales évoquées plus haut. Elle se constitue ainsi en médium où infusent les idées, les impressions, les désirs auxquels les médias vont donner forme.
Car les médias ne transmettent rien : ils structurent les thématiques immergées dans l’opinion publique, "pour" la population – une invention politique pour le coup, que se partagent les médias et les institutions politiques.
Pour rappel, cette idée de population est celle qui, comme l’a clairement explicité Michel Foucault, a pris lieu et place de l’idée de Peuple. Médias et Pouvoir politique, en France, ont tout fait pour liquider le Peuple français, une catégorie relevant du politique, de ce politique qu'ils voulaient confisquer pour ne laisser au lieu vacant de la Démocratie que des populations, à savoir des catégories biologiques ou biologisées (jeunes, vieux, ados, femmes, immigrés, etc.), enfermées dans des dispositifs sécuritaires. Des populations devenues sujets et objets des mécanismes sécuritaires
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5 juin 2012 2 05 /06 /juin /2012 04:07

hemicycle_a-vide.jpgL’enjeu est d’importance : il ne s’agit rien moins que de clarifier non seulement les conditions de l’exercice démocratique du pouvoir dans notre société contemporaine, que les fondements de l’autorité politique dans les démocraties d’aujourd’hui.

Pierre-Henri Tavoillot identifie un certains nombres de ces figures du Peuple dans ses cours de philosophie politique. Mais commence par oublier la routine de l’Etat comme figure de la souveraineté populaire. Cette routine qui assure la continuité du travail de la Haute Fonction Publique, aux commandes concrètes de la machine étatique nationale. Une machine qui, à travers son fonctionnement même, ses rouages, ses institutions, organise le fait démocratique. C’est l’oublier et taire que la démocratie doit être lisible dans son fonctionnement même et que de ce point de vue, encore une fois, la présidence "normale" inaugurée par François Hollande est un vrai signe de rupture, non seulement avec la précédente présidence, mais tout autant avec toutes les précédentes, y compris celle de Mitterrand. Attendons, certes, de nouvelles réformes de cette machine, qui à tout prendre ne sauraient être plus préjudiciables à la démocratie que celles prises à la hussarde par Sarkozy, contre l’Etat qui plus était, plutôt que contre ses dysfonctionnements. De ce point de vue, on a vu ce qu’il en aura coûté, par exemple, de la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite par l’équipe de Nicolas Sarkozy, appliquée sans discernement, confondant logique d’entreprise et service public –on en a assez montré le scandale et le ridicule pour revenir sur ce point.

La Fonction Publique est bien l’une des expressions de la souveraineté populaire, témoin entre autres, dans la fabrique des élites, des ratés de la méritocratie. Une figure qu’il convient de mieux encadrer.

En fait, Pierre-Henri Tavoillot centre surtout sa réflexion sur une figure du Peuple qui lui paraît plus centrale : celle de l’homme politique. Un professionnel, prétendant légitime à incarner la parole du peuple à travers le mandat qui lui est confié. De ce professionnel, notre philosophe tente surtout de montrer combien sa tâche est, aujourd’hui, difficile, comme pour nous dissuader de toute critique par trop sévère à son encontre. Certes, s’il convient de ne pas tomber dans le mépris, voire la défiance vis-à-vis de cette catégorie de citoyens un peu particulière pour nourrir un anti-républicanisme frelaté, pour autant, il n’est pas moins légitime de se montrer plus exigeant qu’on ne l’aura été à son endroit !

justice.jpgA côté de cette figure du Peuple, dans cette curieuse hiérarchie qu’il construit, c’est l’opinion publique qui trouve place tout de suite après la figure de l’homme politique… Une opinion conçue comme forme pacifiée de l’expression publique. On veut bien. Mais quid de la fabrique de l’opinion ? Travestie par les sondages, travaillée au corps par les médias, si elle est une figure incontournable, c’est moins par légitimité que par calcul, moins par raison (thèse de la pacification de l’expression publique) qu’opportunisme politique… Mais là encore, en effet, jusque dans ses contre-pieds les plus saisissants, comme celui dont le candidat Jospin fut la victime, on aura pu y voir l’expression d’une énergie sans pareille, celle de la rue que l’on ne sonde pas mais qui ne s’est jamais vraiment évanouie dans la nature…

La Rue donc, comme l’une des figures sans doute les plus légitimes du Peuple, du moins dans notre imaginaire et notre histoire commune. Quand bien même nos élites affirmeraient à corps et à cris que la rue ne peut gouverner. Elle est, pour le coup, un rouage d’autant plus essentiel que les élites manquent de maturité et les institutions de démocratie.

Bien curieusement, Tavoillot oublie les corps intermédiaires, les syndicats en tout premier lieu… Si proches de la Rue, jetant même dans cette rue les forces vives de la Nation, quand le Pouvoir reste sourd aux revendications légitimes qu’ils énoncent. Au fond, toute la difficulté que l’on a, en France, à penser le bienfondé de l’action syndicale, tient au fait que, par immaturité politique là encore, le Pouvoir central n’a jamais voulu leur accorder des droits comparables à ceux dont jouissent les syndicats allemands, si souvent montré en exemple.

Pierre-Henri Tavoillot est ensuite plus flou quant à l’énonciation d’intérêts plus ou moins nationaux, éligibles à la figure du Peuple. Quels sont ces intérêts ? la Défense ? L’Intérieur ? D’autres, plus troubles encore : industriels, économiques… On voit tout le mal qu’on aurait à en dresser la liste. Mieux : à en définir la légitimité, y compris dans le cadre du ministère de la Défense comme celui de l’Intérieur… Qui en décidera au demeurant, sinon l’état, y compris dans la formulation des grandes causes industrielles nationales ? Qui donc en dernier recours, sinon l’homme politique, soumis dans le cadre des intérêts économiques à de bien intrigants lobbies ?… On voit ici se dessiner des contours très flous de légitimité… Et bien suspects au fond.

autoritéPareillement de ce qu’il nomme l’International, comme figure paradoxale du Peuple. Moins du peuple au vrai, que de l’idée de souveraineté nationale… International où s’incarne, mieux que partout ailleurs, la Raison d’Etat, suspendant bien souvent la légitimité populaire pour peser sur notre destin au nom d’intérêts parfois très peu légitimes, on l’a vu avec la crise de la finance internationale…

Et s’il évoque bien la figure du Juge, si indispensable au bon fonctionnement de nos démocraties, c’est pour oublier que ce même fonctionnement ne peut se soustraire à une critique des opérations de main mise sur cette justice par des hommes politiques peu soucieux de démocratie... Alors la Justice, oui, mais réellement indépendante.

Qu’il faille combiner avec toutes ces figures pour reconstruire l’idée de l’autorité politique, nul n’en disconviendra. La démocratie, au fond, il faut cesser de l’envisager sous les espères du mythe ou de la réalité. La nécessité de combiner avec ces différentes figures de la légitimité populaire implique de comprendre que la démocratie est une méthode avant tout. Et qu’au sein de cette méthode, les techniques de gouvernement sont un fabuleux levier d’avancée ou de recul de cette démocratie. C’est là qu’il faut travailler, François Hollande ne s’y est pas trompé avec sa volonté de rétablir une présidence normale. Même s’il faudra aller plus loin sans doute, cette normalité n’ayant jamais été une tradition française. Il faudra donc doubler cette volonté d'une vigilance, la nôtre, celle d’une opposition raisonnable au pouvoir en place, même "ami", opposition sans laquelle aucune démocratie ne peut survivre.

 

 

Les métamorphoses de l’autorité, Pierre-Henri Tavoillot, FREMEAUX & ASSOCIES, mai 2012, 4 CD-roms, 1 livret de 8 pages, ean : 3561302537221.

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2 juin 2012 6 02 /06 /juin /2012 04:35

Aucune société humaine ne peut faire l’économie d’une relation à l’idée d’une société meilleure… Tout se passe ainsi comme si le social était secrètement travaillé par un rêve, comme s’il existait une nécessité fondatrice de l’utopie.
Mais qu’est-elle, cette nécessité ? Un mauvais Infini ? Ou l’expression de cette clarté vaporeuse dans laquelle l’homme se révèle à lui-même ?

Dans cet ouvrage savant mais d’une lecture aisée, Miguel Abensour tente de croiser les leçons de Thomas More et de Walter Benjamin pour percer les vertus de l’utopie.
Proche parente de l’héroïsme de l’Esprit, ne se donne-t-elle pas pour tâche de repérer les points aveugles de l’émancipation moderne ?

Des deux volets que comprend l’étude, le plus tonifiant est sans conteste celui qui porte sur la réception de L’Utopie de Thomas More dans le monde occidental. Pendant des siècles, la critique l’a comprise comme un projet de société. Tel Kautsky tenant More pour le précurseur du socialisme. Ou les théologiens chrétiens y décelant un retour à une société païenne vertueuse, proche, dans ses valeurs, de l’idéal social chrétien. Au point que le catholicisme social du XIXème siècle, l’a relue comme l’expression d’un conflit entre le capitalisme naissant et les valeurs communautaires chrétiennes, pour en appeler au retour du sens de la communauté médiévale.

S’appuyant sur la pensée de Léo Strauss (contestée, certes), Abensour tente d’en restituer la vraie nature. Posant la question de l’écriture comme séminale, il en dégage la valeur propre : L’Utopie n’est pas politique dans ce qu’elle dit, mais dans la manière dont elle le dit. C’est-à-dire dans l’effectuation de ce dire, la ruse de la raison devenant l’instrument par lequel l’individu accède désormais à sa liberté. Le problème étant, aujourd’hui, de savoir si le raisonnable n’occuperait pas cette place dévolue jadis à la raison. Le manque de souffle de l’histoire nous conduisant ainsi à faire malgré nous l’expérience d’un monde sans utopie.

 

L’Utopie de Thomas More à Walter Benjamin, Miguel Abensour, éd. Sens et Tonka, coll. 10/vingt, , 1er trimestre 2000, 212p. - réédité en 2009 chez le même éditeur, EAN : 9782845341876

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 04:38

manif-espagneLa révolution française avait rompu décisivement avec l’ancienne idée d’autorité, en constituant le Peuple comme seule autorité politique légitime, seul principe de légitimité politique. Mais qui est ce Peuple ? Où le chercher ? Du côté de la société civile, ou du côté de l’Etat ?

La question ne fut jamais réellement tranchée, ou plutôt, nous dit Pierre-henri Tavoillot dans son cours de philosophie, tout au long de notre histoire moderne, trois conceptions ont disputé cet enjeu, plaçant tour à tour l’Etat ou la société civile en position de force, avant que le libéralisme philosophique, qu’il ne faut pas confondre avec le néolibéralisme qui sévit aujourd’hui dans le monde, ne vienne proposer une position médiane sur la question, nécessairement décevante, mais qui s’est montrée relativement efficace pour assurer à nos sociétés un fonctionnement plus démocratique que par le passé.

Tous se mirent cependant d’accord sur un point : l’idée n'allait pas de soi, il fallait en construire la règle.

Les révolutionnaires de 1789 pensèrent le Peuple comme un obstacle. Pour Saint-Just par exemple, ce peuple n’était pas à la hauteur des ambitions de la nouvelle démocratie qui voyait le jour. Il ne pouvait l’être parce que gavé des préjugés de l’ancienne société. Il fallait donc le changer, le dissoudre, en s’appuyant certes sur son énergie, mais le renouveler tout de même et par la force, tant les temps révolutionnaires paraissaient comptés. Dans son entourage, on songea ainsi à rafler tous les enfants de France pour les soustraire à leurs milieux et les rééduquer dans les internats de la République. A terme, une génération de révolutionnaires fidèles aux idéaux de la Révolution en serait sortie. Ce pourquoi l’Instruction Publique devint un enjeu politique de toute première importance.

Le peuple réel conçu comme un empêchement, seules ses élites, aux commandes de l’état, pouvaient éclairer cette masse indistincte.

Elysee palaisDes tenants de cette conception étatique, sans évoquer ceux du communisme d’Etat, naîtra aussi bien un Durkheim pensant que l’Etat n’était rien moins que le cerveau de la société et que seul, sous l’impulsion de ses élites et autres experts, il pouvait conduire le destin de la nation…

Le vocabulaire révolutionnaire trouva sa justification dans l’usage du mot plèbe, substitué à celui de Peuple : la plèbe était nécessairement ignorante, forcément violente, et habituellement versatile. Des échos de cette versatilité nous parviennent encore aujourd’hui et ont été la cause des petits arrangements pris avec le calendrier électoral, pour que désormais la majorité présidentielle trouve sa majorité législative et parvienne enfin à chasser le spectre de la cohabitation à la française, dans laquelle le personnel politique n’a pas voulu voir l’intelligence d’une réponse politique appropriée, apportée par le peuple français à une situation politique contestable.

L’ambiguïté des volontés politiques n’aura cessé, de fait, d’exhiber ses limites quant à la volonté générale. Car si le peuple inscrit bien l’idée de volonté nationale, encore ne s’est-il agi bien souvent que d’un peuple sérieusement encadré… La Démocratie a pris ainsi corps sur cette ambiguïté d’un peuple tout à la fois héroïque et diabolique.

Le peuple de la Démocratie, aux yeux de la Droite comme de la Gauche républicaine, aura été essentiellement conçu comme une foule à instruire, autant au sens pédagogique que juridique du terme. S’il est moins question aujourd’hui de la changer cette foule, cette plèbe, ces masses plus ou moins informes, ou de la régénérer, il n’en reste pas moins que le thème du courage nécessaire des réformes que le pouvoir central doit savoir engager, souvent contre la nation elle-même, forcément ignorante, aura actualisé cette conception d’un peuple porteur des préjugés et des attentes du vieux monde. Seul François Hollande, dans sa campagne, aura situé l’enjeu du changement politique ailleurs : ce n’était pas le peuple qu’il fallait changer, mais sa tête. Un bon signal…

autoritéProudhon, lui, s’opposa fermement à cette conception de l’Etat seul réceptacle de la volonté générale. Pour lui et les anarchistes, seule la société civile était dépositaire de l’autorité politique. Le Peuple souverain devait le demeurer, il fallait dissoudre l’Etat. Personne ne devait gouverner, pas même le peuple en son nom propre. La Démocratie était à ses yeux un pouvoir carcéral, il fallait donc déconstruire tout pouvoir. La solution n’est pas aisée, et le modèle athénien d’aucun secours dans notre configuration…

Il y eut donc longtemps les tenants du pouvoir de l’Etat faisant face à ceux du pouvoir de la société civile. Le libéralisme philosophique tenta d’accorder ces deux voies en affirmant qu’il fallait maintenir les deux instances du Peuple et de l’Etat à égale distance du pouvoir politique. Plus facile à poser théoriquement qu’à animer démocratiquement…

Le socle libéral proposa donc de maintenir la sphère privée de la société civile et celle de l’autorité Publique à travers l’Etat conçu comme garant de la cohésion nationale. Doctrine de la primauté de l’individu, il fallait en conséquence limité les pouvoirs de l’Etat. Limitation en charge du Droit, instruisant du coup fortement le thème de la Justice dans nos sociétés modernes.

Nous sommes les héritiers de cette conception libérale de la philosophie du droit naturel. Des héritiers en pointillé : le dernier quinquennat aura montré à quel point il était mauvais élève et en avait trahi les soubassements philosophiques. L’UMP est grandement en cause dans cette trahison, qui a provoqué la montée en puissance des attentes d’une société civile exaspérée. Nous sommes les héritiers d’une demande d’Etat plus juste et mieux fondé. Pour autant, sans doute n’avons-nous pas trouvé encore les équilibres institutionnels qui rendront justice de nos demandes. Equilibres qui restent à penser, et construire.

 

Les métamorphoses de l’autorité, Pierre-henri Tavoillot, FREMEAUX & ASSOCIES, mai 2012, 4 CD-roms, 1 livret de 8 pages, ean : 3561302537221.

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29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 04:09

17juin89.jpgPierre-henri Tavoillot, dans ses cours sur l’autorité, nous entraînait dans une passionnante genèse du concept d’autorité politique, de la Grèce à la France des Lumières, tout en observant que les réponses apportées sur la question par les grecs ou par Rome nourrissaient toujours, souvent pour de très paresseuses raisons, le débat politique contemporain. Un débat qui longtemps se résuma à l’alternative : Idéal, ou Real politik ? Platon ou Machiavel ? Deux horizons à l’intérieur desquels aujourd’hui encore nombre de nos réponses prétendent se déplier. Mais deux réponses intrigantes, signant la sortie de la politique. Pour Platon en effet, ce choix de l’idéal ne peut que rater le souci du politique, son idéal n’étant pensable que dans le cadre de l’utopie d’un monde abstrait, vivant en paix et en harmonie avec lui-même, et au sein de ce monde, tous avec chacun. L’autre grande signature de l’échec, Tavoillot la situe dans Machiavel, l’œuvre la plus considérable sans doute du champ de la réflexion politique. Car Machiavel annule lui aussi le politique en ignorant l‘aspiration des hommes au Bonheur. Or Machiavel mit fin à l’ordre politique ancien, provoqua une crise du dogme pour établir la norme moderne de l’ordre politique qui instaure comme seule autorité politique celle de la Raison d’Etat. En elle on a pu lire la matrice de tous les principes qui ont fondé l’action politique jusqu’à nos jours, comme la matrice de l’histoire que l’on a voulu nous imposer, qui n’était rien d’autre, à travers celle des élites, que l’histoire de la persévérance d’une volonté publique ordonnant autoritairement les finalités du vivre ensemble : le Prince doit maintenir l’ordre, l’état est la condition du salut sur la terre. pv-17-juin.jpgFace à cette réponse par trop inique, une seconde réponse se fit jour peu à peu dans l’histoire des hommes, identifiable sous les traits de la philosophie du Droit dit naturel. Il s‘agissait pour ce courant de pensée de trouver et fonder en l’homme le principe d’autorité. Contraint de répondre d’abord à la question de savoir où gisait l’essence de l’homme, nos penseurs explorèrent l’anatomie et la psychologie, la nature humaine et ses cultures, pour en définitive conclure qu’il n’existait que des situations et que la toute première d’entre elle était cette capacité de l’être humain à s’arracher à sa nature : seule la liberté importait et fondait a posteriori son essence.

L’école du droit naturel, disparate, de Grotius à Rousseau, finit, bien avant Sartre, théoricien des situations humaines, par trouver un accord non quant à une définition, mais, et c’est sans doute le plus important et une avancée sans précédent dans la pensée humaine, sur une méthode de raisonnement : aucune fondation ancienne n’était plus pertinente. Il fallait donc faire table rase des principes anciens, déconstruire leurs soubassements et se mettre en quête d’un fondement solide : le contrat social, à partir duquel l’on pouvait reconstruire tout l’édifice politique. Tous finirent par se mettre d’accord sur des principes fondamentaux : liberté, égalité, sûreté, propriété, etc. Il n’y avait certes pas grand chose de neuf là dedans, ainsi que le fit remarquer malicieusement Spinoza, puisqu’il s’agissait tout simplement de séculariser le Décalogue et les évangiles. autoritéMais l’essentiel n’était pas là : il était dans le fait que cette sécularisation était cette fois le produit d’une réflexion individuelle, non l’héritage d’une Parole révélée, et que ce faisant, cette réflexion sanctionnait la puissance d’une autorité purement humaine. C’est comme cela que peu à peu s’est imposée l’idée démocratique, conçue comme l’efficacité théorique du droit naturel et non un contenu formel sur lequel engager des discussions sans fin. La démocratie n’était pas une réalité mais un principe, voire, mieux encore : une méthode. Le retournement était spectaculaire. Il s’affirma pleinement, politiquement, le 17 juin 1789, date à laquelle les Etats Généraux s’autoproclamèrent Assemblée Nationale. Le peuple constituait désormais le principe de la légitimité politique, il était cette autorité purement humaine que les hommes avaient tant désirée.

  

 

Les métamorphoses de l’autorité, Pierre-henri Tavoillot, FREMEAUX & ASSOCIES, mai 2012, 4 CD-roms, 1 livret de 8 pages, ean : 3561302537221

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9 mai 2012 3 09 /05 /mai /2012 04:41

sayed.jpgUne histoire vraie. Celle de Mehdi Sayed. Celle d’un autodidacte parlant l’arabe, le français, l’italien, le roumain. Celle d’un autodidacte cultivé. Qui a fui la Tunisie en 1983. Qui a connu la misère dès sa sixième année. Qui a été arrêté à sept ans. Habitant ici, puis là, abandonné à la violence ordinaire, faisant le coup de poing pour y échapper, livré, sans cesse, à la brutalité d’un monde injuste. C’est l’histoire d’un gamin privé de scolarité et contraint de vivre seul. Moins libre que livré à lui-même. D’un môme qui a dû se construire dans l’adversité, de petits boulots en petits boulots, exploité par tous, exposé dès son plus jeune âge au rêve français que les touristes exhibent sans pudeur. C’est l’histoire d’une vie déposée très tôt, confrontée à la violence de la convoitise, qui finit par se jeter à l’eau pour traverser la Méditerranée à la nage. C’est l’histoire d’un gamin qui échoua sur une plage italienne à la poursuite du rêve européen. A la boussole. Jeté bientôt dans les affres du travail clandestin dont les patrons ne sont jamais avares. C’est l’histoire d’un gamin qui voulait vivre et qui a survécu, qui a grandi et dont le calvaire ne changea pas, devenu jeune homme. C’est l’histoire d’une vie clandestine en France éclairant d’une lumière crue toute l’économie souterraine qui profite aux patrons véreux, aux politiciens crapuleux, aux caïds de la drogue. Marseille, Toulon. Toulon : une ville où l’on vote massivement FN et où l’on accueille volontiers les clandestins pour les exploiter jusqu’à plus soif.

Mehdi vécut une première fois sept longues années en France, d’une traite, avant de se retrouver en prison et d’être renvoyé dans un pays dont il avait fini par devenir étranger. C’est l’histoire d’un sans papiers contraint de vivre au jour le jour, plongé dans l’impossibilité de construire quoi que ce soit de durable. Ni réussir ni mourir, juste durer. Comme durent les choses. C’est l’histoire des logements insalubres que l’on réserve aux clandestins. Une histoire méditerranéenne. Une histoire de tempêtes bien réelles, de naufrages et de survie au milieu de la mer, à boire au goutte à goutte l’eau de refroidissement du canot à moteur sur lequel on dérive. C’est l’histoire de l’argent facile, des flics pourris, des êtres fragilisés exposés à toutes les vindictes, toutes les brutalités, toutes les exactions. C’est l’histoire d’un peuple souterrain dont l’existence révèle l’hypocrisie, les mensonges, la violence de la République française. Un peuple épris d’une liberté refusée. C’est l’histoire d’une survie âpre, à fuir les chasses qu’on organise pour vous tuer. C’est l’histoire d’un homme qui a fini par grandir et devenir adulte et, nettoyé jusqu’à l’os, au terme d’une dérive de 33 ans, a compris que sa dérive n’était rien moins que celle d’une humanité vaine, à la peine avec elle-même.

 

 

Ma vie de clandestin en France, 17 ans d’errance dans la France d’en dessous, de Mehdi Sayed et Virginie Lydie, nov. 2011, éd. La boite à pandore, coll. La boîte à Pandore, 224 pages, 16,95 euros, ean : 978-2960074185 .

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7 mai 2012 1 07 /05 /mai /2012 04:37

hollande.jpgC’est maintenant que tout commence. Maintenant qu’il faut convaincre, poser les actes symboliques qui lèveront les craintes, mobiliseront les volontés, soulèveront les ferveurs. C’est maintenant qu’il ne faut rien recommencer. Surtout pas mai 81 ! Car c’est maintenant qu’il faut rompre, aussi, avec cette ancienne fausse droite affublée d’un gros nez rose, qui nous a tant coûté. La Droite est à reconstruire. La Gauche aussi. Ce que le Président Hollande semble avoir compris, lui qui n’a eu de cesse, tout au long de sa campagne, de chercher les nouvelles narrations politiques capables de pointer cet horizon nouveau où cesser de désespérer. Lui qui n’a cessé de placer la question du pouvoir et de son exercice au cœur du débat politique français. Le Président Hollande a parfaitement compris que le candidat sortant avait abîmé la gouvernance républicaine, au point qu’avec lui, l’Etat n’était plus identique à la société –et ne cherchait du reste pas même à la représenter. Le Président Hollande a parfaitement compris que tout le problème, effectivement, était désormais de poser les cadres institutionnels qui sauraient limiter la Puissance Publique pour en garantir l’efficacité et l’orientation fondamentale, celle de la Justice, qui est l’essence même du caractère démocratique de nos sociétés.

C’est pourquoi l’électorat devra récupérer encore, demain, sa capacité à donner de la voix. Car il est temps de réaliser que le quinquennat qui s’achève aura tout fait pour faire voler en éclat la sphère du citoyen, et nous faire oublier que le citoyen vivait dans le champ politique de l’engagement public pour le Bien Commun, à l’inverse du bourgeois ou du bobo, qui ne sont que des usuriers du droit commun.
Contre les discours égoïstes, contre les discours de haine, contre les discours de peur, les travaux que le Président Hollande devra entreprendre sont énormes : le candidat sortant abandonne un pays ravagé. Un pays qu’il a ravagé. Il lègue aux français son désastre. Economique tout d’abord, avec ce qui apparaît désormais comme la présidence la plus dispendieuses de toute l’histoire de la Vème République. Un désastre politique ensuite, qui n’aura cessé de propulser sur le devant de la scène le Front National, au risque de briser la Droite républicaine et de la faire tomber entre des mains nauséabondes. Un désastre moral encore, le candidat sortant ayant réussi ce tour de force de faire du mensonge la rhétorique de l’Etat français, de faire de la division la rhétorique de l’Etat français, de faire de l’exclusion la rhétorique de l’Etat français. Un désastre idéologique. Un désastre civique. Un désastre culturel. C’est maintenant que tout commence. Sur ses ruines.

 

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4 mai 2012 5 04 /05 /mai /2012 04:30

bastille.jpgDolar, dans son dernier essai publié aux éditions NOUS sur les métaphores de la voix en usage dans nos sociétés, consacre un chapitre à la Vox Populi, telle qu’elle s’est construite puis soustraite aux démocraties occidentales. Un regard intéressant sur ce qui, au filtre de l’isoloir, se perd et que l’on entend ici et là gronder dans les votes protestataires : ces voix que l’on n’aimerait pas entendre, que les gouvernements plutôt ont peine à entendre et que leur ordre ne satisfait pas. Mais qu’a-t-on perdu au juste, de la rue à au bulletin de vote ?

A la voix vive de la Révolution française, nous avons substitué la voix réfléchie de l’électorat national. Une maturation, nous dit-on, tant la Vox Populi a mauvaise presse –Sarkozy ne s’est-il pas enorgueilli de n’avoir pas céder à la pression de la rue ? La Vox populi, cette image ritualisé de la voix populaire, de la voix du Peuple à laquelle nous avons préféré les voies d’une société plus organisée, pacifiée, a pourtant immortalisé un mirage toujours en grâce : celui d’une Nation qui par le miracle des urnes parlerait d’une même voix, celle de son Président. Celui d’une nation unie plutôt qu’unifiée, fantasme des démocraties acculées à des choix douloureux, sommation des Républiques installées sous le feu des menaces internationales.

Une voix pourtant réduite bien souvent au silence, non pas tant de l’isoloir, cette cellule qui supprime l’éclat collectif de la Voix populaire, écrit superbement Dolar, que dans sa sortie des urnes, la déversant aussitôt dans l’éloquence des majorités promptes à ramasser les moindres miettes de leur victoire. Car sitôt passé le vote, cette voix électorale devrait rester silencieuse… Dénombrée, mesurée, soumise à l’arithmétique, confiée à un signe écrit, privée désormais de toute l’intensité de la campagne électorale, sinon étouffée, parfois divisée comme ce fut le cas avec le candidat sortant, elle est appelée à rentrer dans le rang, à se taire, à attendre le prochain temps de parole qui lui sera accordé.

Rappelez-vous cependant ce que furent jadis les grands moments de la parole du peuple français, ce Peuple appelé, appelant à donner de la voix, à légitimer, par son vacarme, ces clameurs, toute promesse d’investiture en son nom.

Reste il est vrai l’acclamation de l’investiture. Partielle, on l’a dit, puisque celle d’une majorité, celle des vainqueurs, cris exclusifs dont sont exclus ceux des perdants, qu’il faudra bien entendre pourtant…

voix-dolar.jpgA la voix du Peuple, on a substitué la voie électorale. Contre la nature fugace de la voix, nous dit Dolar, nous avons cherché à inscrire cette voix du bulletin de vote dans une durée. Nous avons cherché à la circonscrire, à la domptée.

Mais que faisons-nous du supplément indomptable ?

La voix du vote bien trop souvent a autorisé tous les chantages. On l’a vu dans la rhétorique légitimaire du candidat sortant. A commencer par le plus vil d’entre ces chantages, celui fait sur le peuple. Sur sa moitié abandonnée, perdue, confisquée. On l’a bien connu avec le candidat sortant. Sa représentation publique, sur-codifiée, scella le destin de la France d’en bas, tragique, de soumission. Le sceau d’une conception de société.

Mais comme il est impossible de faire taire longtemps cette France là, on a pu l’entendre clamer de plus en plus fort sa colère, tandis que les autorités parlaient à l’endroit de cette Voix soudainement ressurgit d’obscénité. Lorsque la Voix du Peuple surgit, nous dit Dolar, elle produit en effet toujours un effet d’obscénité. Mais, ajoute-t-il, c’est cette voix seule qui préserve des abus de l’autorité. Contre la Voix autoritaire du Chef d’Etat, il n’est d’autre possibilité que cette voix obscène aux yeux des autorités. Obscène parce qu’elle refuse de se mettre en scène, comme le fait la voix de l’autorité, décalquant son modèle de ceux hérités des régimes les plus durs. Une voix affublée, qu’elles opposent à cette voix obscène du peuple en colère. Une voix affublée qui porte bien souvent au delà de tout sens, celle que l’on a fini par entendre dans la bouche de Sarkozy, incantatoire, la voix de la promesse d’une suspension de la Loi démocratique pour en appeler au "vrai" peuple, clivé, haineux, revanchard. Une voix qui aura fini par refuser de fournir un énoncé politique à cette voix du peuple, pour l’enfermer dans des résonances idéologiques douteuses. Reconstruisant la voix populaire dans cette petite fabrique symbolique que l’on a connue, qui sollicite l’excès, les voix d’interpellation privées de tout contenu positif, les voix sonores de l’affabulation de l’ordre. Des voix logées dans la sphère de la subjectivité, articulant un secret qui leur échappe infiniment. Or quand le peuple ne peut accéder à son lieu, conclut Dolar, quand la Loi se met à devenir énigmatique à ses yeux, car autorisant toutes les dérives personnelles, quand le peuple ne peut plus localiser le lieu symbolique depuis lequel sa voix est réellement proférée, xénophobie ou simple élément de langage, quand il ne peut plus en définir la logique, la seule chose qui soit sûre, c’est que son destin lui a échappé.

Fasse donc que notre destin ne nous échappe pas, et qu'une fois nos voix entendues, nous saurons les relayer au-delà des seuls résultats électoraux : elles sont le prototype d’une société nouvelle que nous portons en nous, la texture du social, des voix cette fois réellement dotées d’un sens, qu'il ne faudra pas disperser à la hâte.

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3 mai 2012 4 03 /05 /mai /2012 04:16

sarko-drapeauInsignifiant. Signifiant le pire plutôt, toujours, sans vergogne, sans mesure, approximatif et démagogue, osant un mensonge après l’autre, agitant le spectre de la peur, toujours, toujours menaçant, toujours comminatoire, mais ignorant fondamentalement qu’il aura été au pouvoir ces dix dernières années. Se plaignant donc, sans rire, des égarements de son prédécesseur, lui-même, sur l’immigration dont il aurait laissé filer les comptes, revenant, en creusant un trou politique (une fosse) de près de trente ans dans l’histoire, sur les égarements de François Mitterrand, accusant encore et toujours les 35 heures, que la droite avait tout loisir d’abroger tout au long de ses années de pouvoir et dont elle donne le sentiment de n’en avoir conservé les restes que pour les exhiber au gré de ses propres désastres et pour dissimuler ses insuffisances en matière de relance économique…

Un président sortant ignorant donc qu’il aura été le responsable de la décision politique ces cinq dernières années, et l’ignorant essentiellement, tant il semble avoir fait siens les conseils d’un Carl Schmitt, l’idéologue des droites les plus rogues, affirmant que l’homme du pouvoir autoritaire devait se comporter vis-à-vis de l’Etat comme si l’Etat n’était qu’une modalité de la politique, l’autre étant son constant effort pour rompre la communauté nationale, la diviser, la cliver. Le partisan, ainsi que le rappelait très à propos François Hollande. Un chef d’Etat partisan, nommant au gré de ses caprices, légiférant au gré de ses anxiétés politiciennes, qui aura finalement passé ses cinq années à fabriquer de l’opinion publique et quelle : celle qui le reconduirait dans ses fonctions –il le pensait du moins.

Un partisan œuvrant contre l’Etat lui-même, selon l’enseignement du même Carl Schmitt, confiscant les pouvoirs, combattant irrégulier, déloyal, conscrit du pire qui n’avait besoin que d’un récit de légitimation pour justifier ses actes et sa petite fabrique d’opinion, brandissant le chiffon de l’immigration érigée en souci majeur du peuple français quand ce dernier ne cessait d’exprimer son inquiétude devant la dégradation de l’emploi, sa peur devant la formidable montée en puissance de la précarité, sa détresse devant notre paupérisation forcenée !

Un président construisant jour après jour une légalité factice, un président en sécession, exactement comme le conseillait Carl Schmitt à l’homme que le Pouvoir inconditionnel tenterait. En sécession vis-à-vis de la communauté politique officielle et souveraine, à commencer par ses propres rangs, demain liquéfiés. Un président partisan, détaché de l’Etat, nécessairement conseillait Carl Schmitt, mais rattaché à une seule cause poursuivait-il : celle de la crispation identitaire. La crispation pour seule légitimité acceptable, prétendait Carl Schmitt, que le Chef de cet Etat autoritaire devra brandir comme supérieure à la légalité étatique. Tout le discours de Nicolas Sarkozy repose au fond sur cet imaginaire du partisan tel que le définissait Carl Schmitt, divisant, montant les français les uns contre les autres, et engagé dans un combat défensif (c’était exactement sa posture hier soir) : la défense d’une certaine idée française, nourrissant et circonscrivant son hostilité à ces français d’origine maghrébines, incroyablement rabattus sur une religion que l’on n’aura cessé cinq années durant de stigmatiser. Une hostilité technique, disait Carl Schmitt, technique parce qu’il s’agit simplement de créer les conditions de l’exercice d’un pouvoir autoritaire, c’est-à-dire politicien, pratiquant le media-activisme comme art du pseudo gouvernement, tant ce qui importe le plus aux yeux de ce type de pouvoir est la construction d’une opinion publique estropiée. Il est de ce point de vue incroyable de réaliser combien Nicolas Sarkozy aura été si peu président. Il le dit lui-même quand il parle du nucléaire par exemple, incapable de prendre non pas la décision qu’il feint de reprocher à François Hollande, d’affaiblir l’indépendance énergétique de la France, mais quand il avoue qu’il n’est pas capable d’impulser un souffle nouveau quand notre croissance, au bout du rouleau, exhibe à l’évidence la nécessité d’en finir avec son dogme imbécile et de profiter de cette crise non pas pour entamer une procédure de décroissance, mais au contraire, d’opérer au véritable rebond de cette croissance en assurant sa transition vers des activités économiques et industrielles capables d’assurer notre évolution vers un développement conçu en termes écologique et social. Mais non, voilà un président calfeutré derrière la décision d’experts en sécurité, sans vision pour l’avenir, confiant à ces experts non pas notre sécurité, mais la décision politique ! Un président incapable donc de fixer des axes d’avenir, le nez dans le guidon des sondages fabriquées, incapable d’orienter, d’impulser, incapable de tracer un autre chemin que celui de la division et de la précarité généralisée. Alors oui, il est sans doute temps de donner un locataire à l’Elysée, nous le méritons bien !

 

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1 mai 2012 2 01 /05 /mai /2012 07:24

 

mai36.jpgDiscorde nationale, son 1er Mai à lui !

Relayant la stratégie patronale de destruction des emplois, Sarkozy veut de nouveau monter les français contre les français et célébrer une "vraie fête du travail" dont les relents pour le coup pétainistes ne font plus aucun doute -on se souviendra en effet que c'est Pétain qui instaura ce 1er Mai comme «la fête du Travail et de la Concorde sociale», le 24 avril 1941. Réappropriation sauvage, comme l'affirme à juste titre Libération, dont les accents anti-syndicaux augurent bien de ce que serait son deuxième quinquennat si par malheur Sarkozy devait reprendre le Pouvoir ! Une fête qui aboutirait à célébrer la vraie précarité pour tous, inutile de revenir sur le bilan de Sarkozy en la matière, désormais bien connu, tout comme il est inutile de préciser que la crise n'est qu'un prétexte.

Alors revenons un peu en arrière à propos de travail : du temps de Sartre, la nécessité de fournir un travail était la norme éthique de la société bourgeoise. Aujourd’hui, c’est fini. Le pouvoir politico-médiatique, le plus scandaleux et le plus cynique qui ait jamais vu le jour, part, lui, du principe que le travail n'est qu'une variable d'ajustement des marchés financiers, ou qu'un élément de langage que l'on peut jeter comme un os à ronger aux plus fragiles pour leur faire avaler des couleuvres. De proche en proche, ce pouvoir aura fini par instruire des groupes sociaux comme n’étant plus des sujets du Droit français. Ce n’est pas seulement que la norme ancienne, bourgeoise, ait été suspendue ; la violence  hors norme qui a été mise en perspective dans l’espace social s’est exprimée comme aucune autre avant elle, rejoignant, tout bien considéré, les discours enflamés du populisme noir des années 30 qui paraît soudain de nouveau taillé à notre mesure !

Le populisme noir pour ultime vérité d’un Peuple moins introuvable que dissimulé, exhibé aujourd'hui sans vergogne par un Pouvoir qui témoigne d'une pathologie sociale terrifiante. La France d’aujourd’hui ? Sarkozy voudrait en faire une foule sans légitimité. La précarité de masse ? Un élément de langage. Le travail ? Une simple variable d’ajustement. Tout centime financier vaut mieux que la vie d’un travailleur. Et l’on ne nous demande sûrement pas de donner notre avis sur cette option fondamentale de la société française : le Capital France relève du bon usage des techniques financières. Plus d’interdit : la vie humaine n’est plus sacrée. Demain, des millions d'autres à la rue. Un vrai crime d’Etat, qu’on se le dise, car ce dernier ne protègera que certaines vies, définies sous le manteau des barons de la Finance. Cette amoralité sordide masque tout juste qu'il y a un cadavre dans le placard de la Nation française : celui de la France d’en bas, et que sous ce cadavre repose une plage, une vraie, où les nantis se dorent la pilule. L’horreur serait donc notre seul avenir commun... La précarité de masse, le seul vrai destin de cette France de Sarkozy. Superbe pied de nez à l’Histoire : la France est ruinée par une certaine idée libérale de la Nation française ! "Ruinée" : cela dit assez que la France d’en haut ne fait qu’imposer un cheminement pseudo éthique à l’opinion nationale : on demande aux plus désespérés de garder foi en toutes les trahisons à venir ! Enorme mystification : l’option morale n'est en fait qu'une option politique au sein de laquelle l’intolérance est devenue la norme. Une norme institutionnalisée par l’Etat lui-même. La norme de cette "France bourgeoise au dos facile", comme l'écrivait Verlaine dans un poème d'hommage à Louise Michel, de cette France arrogante que la rage mord et qui croyait avoir trouvé son commissionnaire, à défaut de hérault !

 

Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale, rapport 2009-2010 :

http://www.onpes.gouv.fr/Le-Rapport-2009-2010.html

le rapport lui-même, en pdf : http://www.onpes.gouv.fr/IMG/pdf/RapportONPES_2009-2010.pdf

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