RSA : les éléments épars d’une violente cruauté
9 Juin 2011 , Rédigé par texte critique Publié dans #poésie
KAMEL LAGHOUAT,
LA GLANEUSE
(Ils veulent diminuer le nombre des morts pour faire grimper celui des vivants…)
"Encombrée de ballots elle avançait vêtue de noir les étoiles du matin annihilées.
Elle avançait sur la place du marché, un lourd sac au bout de chaque bras rempli de sa récolte, des choux, des pommes, les légumes que les marchands jetaient à terre.
La foule des pauvres, peuple en souffrance, fugitif,
Nos voix pour le soutenir, béquille tandis que des ombres agonisent contre les murs des parkings.
Elle avançait les épaules fléchies le soleil de juin nu comme un tombeau.
Cris rauques, huées, on déblayait la place, déjà les machines poussaient les fruits que les pauvres disputaient aux chiens.
Elle veillait à son bien, quatre gros sacs.
Je la voyais, un sac l’autre, les éléments épars d’une violente cruauté,
A côté d’elle nos ruines, la misère, quelle affaire.
Elle s’est couchée plus loin, lasse.
Nous avons dû mourir ensemble déjà.
Nos corps doivent êtres là-bas.
Son voile couvre la colline
Son voile couvre le pays.
Je vous écris depuis sa mort bordée d’épaves,
naufragée vacante où la question sociale est devenue celle de l’utopie ou de la mort, les uns se couchent les autres sont morts déjà,
baiser aux fronts des mères calleuses."
A la fin, la démocratie était seulement le moyen pour les politiques de laisser crever les gens sans faire de vagues. La convention UMP vient de valider les aménagements au dispositif imaginé par l'ancien Haut Commissaire aux solidarités actives, Martin Hirsch -qui n’a pas osé s’y opposer au delà de quelques propos reflétant son amertume. Faisant fi de l’engagement du Président de la République, décidément devenu plus que jamais celui des riches, l’UMP projette de contraindre les bénéficiaires du RSA aux travaux forcés, 5 heures hebdomadaires –sur les marchés, sans rire, commentait l’un d’entre eux- en échange de leur maintien en survie… Le poème de Kamel Laghouat, 19 ans, évoque au fond mieux qu’aucun commentaire la situation dont on parle. --jJ--
Image : Denis Bourges, qui présenta pour les 20 ans de Tendance Floue une série intitulée "Border life", dont les images résument son regard sur le cloisonnement et la frontière. Ici, une glaneuse au marché Aligre, à Paris, en 2010.
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