QUE FAIRE, FACE A UNE CULTURE POLITIQUE MORTIFERE ?
Face à une culture politique qui voit l’Etat confisquer toutes les dimensions du social et du politique aux dépens de toute morale publique, et qu’au mieux l’on dénonce comme une crise normative de la société contemporaine alors qu’elle n’est qu’un accident du politique qui ne cesse de vouloir nous faire prendre son souhaitable pour le réel, que faire ?
Que faire alors que s’annonce la comédie électorale, le bluff des sondages détaillant la vacuité du politique pour ouvrir à l’incertitude d’un changement réel, tant il existe, en France, une vraie incapacité dans la succession politique à produire du neuf, et même si, à tout prendre, Hollande vaut mieux que Sarkozy ?
Changer la vie ? Mais changer la vie ou la société ne veut rien dire. Nous ne pouvons continuer de nous payer de mots quand nos destins se conjuguent au futur antérieur. Quand échanger les rôles, fussent-ils présidentiels, ne sera pas changer la société. Parce que la presse par exemple, ne sera pas davantage demain le lieu d’émergence du vrai.
Que faire alors face à la disparition d’une société que l’on ne peut plus se contenter de décrire, mais que l’on ne sait toujours pas réécrire ?
Que faire quand l’exploration des nouvelles subjectivités collectives ne peut être que le labeur d’un travail organique, souterrain, mené ici et là par des pionniers de l’incertain, du couvert, du ténu ?
Pointer le doigt au loin peut-être, montrer ces luttes nécessaires, signaler les collectifs qui les tressent, les stratégies qu’il nous faudrait inventer pour nous arracher à la fausse fatalité de la Finance et inventer d’autres modes de ré-appropriation créatrice, un autre Vivre Ensemble, déjà…
Que faire de ce symptôme d’une société en décomposition, d’une société traversée souterrainement par des failles dont les observateurs ont tort de croire qu’ils pourront lui trouver des réponses aisément, car peut-être vaudrait-il mieux y voir le début de quelque chose de terrible, indécidable encore.
Peut-être l’éclipse révolutionnaire -(appelons cela comme ça, pourquoi pas)-, inaugure-t-elle d’une sorte de fin de l’éthique du changement social dans la soumission aux Lois du Marché. Ou son abandon sous la pression de l’insécurité qui plombe nos vies, de la fragilité depuis laquelle, désormais, s’énoncent les libertés civiles, de l’absence de ces valeurs de désir qui pourraient orienter ailleurs la production du monde.
Peut-être ne pouvons-nous tout simplement plus comprendre les raisons de nos renoncements -et peu importe que nous sachions décrire à la perfection ce mécanisme subtil qui a fait de l’insécurité le point d’appui fondamental de la gestion du pouvoir politique.
Peut-être n’osons-nous plus organiser de nouvelles subjectivités du changement social parce que le front des luttes à mener est innombrable et qu'il existe une réelle difficulté à réaliser une synthèse idéologique de toutes les révoltes qui émergent ?
Peut-être ne disposons-nous plus de grammaire pour travailler au changement social. De celle qui nous aurait par exemple donné à comprendre qu’il s’opère tout de même un déplacement de l’éthique du changement vers de nouveaux acteurs sociaux et politiques, de nouveaux médias, de nouveaux médiums, sous l’impulsion desquels les lieux de résiliance et de résistance (les réseaux sociaux) seraient en passe de devenir, sans que nous sachions bien comment, des agencements de production de nouvelles réalités sociales et de nouvelles subjectivités collectives.
D’où pourrait surgir les conditions de possibilité d’une intentionnalité collective ? Que faire ? Peut-être simplement commencer là : affirmer ce que nous voulons, sans détail. Et ce que nous voulons n’est rien d’autre que recouvrer notre puissance d’agir. --joël jégouzo--.
image : un tag sur le mur construit par l'Etat d'Israël en Palestine.