ORWELL, ENTRE LITTERATURE ET POLITIQUE
9 Mai 2011 , Rédigé par texte critique Publié dans #Politique
La revue Agone publie pour son numéro de printemps un dossier tout entier consacré à Orwell –en fait la publication des minutes d’un colloque qui s’est tenu à Lille les 19 et 20 mars 2010 : "G. Orwell, une conscience politique du XXème siècle").
Et certes, il suffit de jeter un rapide coup d’œil sur sa production pour réaliser combien il fut le prototype d’un parcours moins exemplaire que familier des engagements puis des renoncements que le court XXème siècle imposa. Socialiste mais anticommuniste, refusant de croire en un Peuple messianique, anticapitaliste mais sobrement libéral s’autorisant volontiers des accents libertaires, si l’on peut certes apprécier ses prises de position, en faveur de la Palestine notamment, son anti-sionisme le mettant en porte à faux avec la plupart des intellectuels de gauche de son époque, restent de multiples confusions idéologiques qui l’auront empêcher d’y voir plus clair, autant sur la question coloniale par exemple, où la problématique de l’Empire devait rester centrale chez lui (malgré ses dénonciations répétées à la suite de ses voyages en Birmanie), tout comme sur la question de l’Europe, où, cherchant une issue instruisant le fumeux concept d’"Etats-Unis d’Europe", Orwell crut bon de frayer avec la revue Preuves, dont aujourd’hui encore les français sont bien les seuls dans le monde à ne pas savoir qu’elle était financée par la CIA et qu’elle était l’instrument culturel mis au point par les Etats-Unis pour aider à la conversion libérale des élites intellectuelles françaises, à commencer par celles dites de Gauche… Bref, le socialisme démocratique auquel rêvait Orwell, cette fameuse Gauche hétérodoxe redécouverte en France dans les années 70, anti-totalitaire, anticapitaliste (mollement) et anticommuniste, n’aura guère préparé les esprits au renouvellement d’une alternative politique… Au fond, Orwell était avant tout un écrivain, non un théoricien, plus engagé dans la réflexion littéraire que politique. Socialiste sceptique, libéral anarchisant (sic), même si la référence au Peuple resta omniprésente dans son œuvre (ouverte comme espace conflictuel), cette conscience politique flottante qui était la sienne, plus propice à fonder une issue littéraire que politique aux problèmes sociaux, n’est sans doute pas une solution que l’on pourrait creuser aujourd’hui. Et plutôt que de l’enfermer au fond dans un après-coup sans horizon, sans doute vaudrait-il mieux l’envisager dans sa dimension historique, celle d’un passé dont nous peinons à nous relever et dont il faudrait comprendre la raison de cette impuissance à le dépasser. --joël jégouzo--.
Orwell entre littérature et politique, Agone, n°45, avril 2011, 212 pages, 20 euros, ean : 978-2-7489-0131-3.
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