Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
La Dimension du sens que nous sommes

MILAN dans les années soixante, la mer, grande consolatrice des amours abîmées.

18 Décembre 2009 Publié dans #Amour - Amitié

amants-mer---copie.jpgBanlieue de Milan, dans les années soixante. Des tours en construction entre des chemins de charretiers. La boue, l’énorme lassitude partout. Deux gosses veulent voir la mer. Ils ne verront qu’une immense flaque au milieu de leur cité. Les années passent, ils ont grandi dans ce décor sordide, au sein duquel les filles perdent leur virginité dans des caves crasseuses. Un jour, Duilio et Simona finissent par préparer un mauvais coup. Un casse minable : piquer la recette du garage d’à côté. Alors tout bascule : le garagiste tire et tue Simona. Duilio s’enfuit au volant d’une voiture volée. Le même soir, Edoarda quitte Milan. Edoarda, une femme quelconque à qui l’on ne parle plus que par déférence, femme démonétisée en qui personne ne voit la femme qu’elle est toujours. Pourquoi ne pas aller à Rimini ? Voir la mer. Pendant que Duilio roule, le cadavre de Simona repose dans le coffre. Il la conduit à la mer lui aussi, grande consolatrice des années soixante. Sur la plage, Duilio tient la main imaginaire de Simona. Il lui raconte les vagues, les foules allongées sur le sable. Mais on lui vole l’alfa dans laquelle se trouve le cadavre de la jeune fille. La voiture finit en rase campagne, où des motards de la police la découvrent. Edoarda songe de son côté qu’elle aimerait tomber amoureuse. Elle croit l’être d’Ernesto. Au volant de sa voiture, elle tombe sur Duilio, défait sous un soleil accablant. Il délire, lui raconte tout. Elle lui porte secours, le cache chez Ernesto. La boucle se referme. L’événement est trop grand pour les deux protagonistes de ces rêves ratés et appelle soit à plus de compassion et de lucidité entre les êtres, soit au mensonge.
Roman d’une lucidité bienveillante, Ernesto s’engagera dans son amour pour Edoarda et Duilio s’en ira reprendre le chemin accompli jusqu’à la mer, avant de se livrer à la police.
Dans ce texte poignant où souffle une vraie empathie, la violence sourd d’une grande tristesse, celle, par-delà le naufrage que l’on sent poindre, d’une humanité lasse de sa condition. Dans cette écriture sensible aux détails de la rue, de la vie, des êtres, c’est aussi un autre visage de l’Italie que nous offre Scerbanenco : celle d’un peuple méthodique, froid, rationnel, acculé à des gestes de désespérés, qui ne peut trouver de rédemption que dans cette fraternité qui s’effrite pourtant et promet de disparaître bientôt entièrement.
joël jégouzo--

Giorgio Scerbanenco, les amants du bord de mer, traduit de l’italien par Laurent Lombard, Rivages / noir, mars 2005, 170p., 7 euros, isbn : 274361398X
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article