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La Dimension du sens que nous sommes

LE TERRITOIRE NATIONAL, L'ETAT ET LA DEMOCRATIE...

25 Octobre 2013 , Rédigé par texte critique Publié dans #Politique

Camp-concentration-Tsiganes-Montreuil.jpgL’Etat contemporain a fini par s’identifier au territoire sur lequel il régnait. Des Peuples qui le composaient, il a nié la diversité pour instruire, littéralement, au sens juridique et pédagogique du terme, une nation prétendument unanime, ré-enracinée fictivement dans l’espace géographique qu’il s’était taillé.

Et qu'importe si par exemple l’unité linguistique de cet Etat, à l’image de ce qui s’est passé en France, n’a été réalisée que tardivement (1914-1918), après bien des détours de terreur (c’est en effet la Terreur qui en imposa la première l’idée). Qu'importe également que les populations de cette prétendue nation ne furent intégrées qu’à reculons dans l’ensemble politique nouvellement créé -l’intégration civique des femme en est un bon exemple. Le territoire national a toujours été le fait du Prince, non celui des Peuples. Le territoire est devenu ainsi la catégorie politique la plus fondamentale des démocraties contemporaines. Au point que l’Etat contemporain tire sa légitimité du territoire qu'il dirige, non des peuples qui le composent. Un renversement politique dont on perçoit bien les échos dans l’idéal de Sûreté Nationale : la Sécurité du Territoire a le pouvoir de suspendre l’ordre démocratique.

Après avoir dissout par la force les peuples qui habitaient son espace géopolitique (bretons, basques, etc.), l’Etat contemporain a ensuite défini d’autorité sa communauté d’obédience : ces fameux français de souche, naguère force tranquille miterrandienne -aux couleurs dramatiquement rurales d'une France qui n'existait déjà plus.

    MEMOIRE-TZIGANE-AMNESIE-FRANCAISE.jpgL’immigré clandestin, le rrom, dans ce contexte, ne peuvent incarner que la négation du territoire. On comprend alors le soin que l’Etat contemporain met à le pourchasser, partout où il croit en débusquer un…

Par ailleurs, ne disposant pas de sources transcendantes, les droits individuels et subjectifs fondèrent la rationalité de l'Etat contemporain, posant a priori que les groupes non seulement avaient, mais devaient disparaître avec le fondement de la République.

Face à l’égalité républicaine, tout groupe ne pouvait être interprété qu’en termes de trahison, sinon de destruction du principe fondateur de l’Etat moderne. La théorie politique moderne refuse en effet de reconnaître la pertinence politique des groupes : ils transgressent les droits des individus en réduisant les personnes à être membres d’un groupe fondant la source de leur identité. L’Etat moderne s’est donc construit sur l’exclusion du groupe : la caractéristique essentielle du droit moderne est d’ailleurs celle de la séparation des individus, sion leur isolement. 

Et si dans ce topos le groupe est l’ennemi, l’ennemi le plus dangereux est celui qui relève du groupe aux origines décrétées "étrangères".

Dans ce topos du territoire national replié sur la construction d’une communauté d’obédience d’une part, et l’affirmation outrée des droits individuels d’autre part, l’ennemi le plus dangereux de l’Etat contemporain devient ainsi l’immigré, quand bien même français depuis trois générations, immigré toujours parce qu'il n'a pas voulu renoncer à son identité musulmane, qui l'insère dans une problématique de groupe (et qu’importe aux yeux de l'Etat qu’il s’agisse d’un groupe religieux, Lui sait étendre le périmètre de la répression dont il a besoin pour affirmer sa puissance).

Figure du traître par excellence, menaçant de l'intérieur même les fondements de son autorité, le musulman ou le rrom se voient ainsi repoussés dans la sphère de l’étranger au territoire.

famille_francaise-1-copie-1.jpgOr les crimes contre l’humanité ont toujours été des crimes commis contre des groupes. Les victimes de ces crimes ont en effet toujours été d’abord identifiées comme relevant identitairement d’un groupe, ethnique, religieux, voire sexuel ou social.

Les musulmans pour Sarkozy, les rroms pour Hollande, forment ainsi commodément les groupes que l’on peut détruire, autorisant par la pseudo radicalité de leur étrangeté, la violence qui dicte l’extermination de l’autre, quand il est jugé trop différent.

Enfin, dans l’histoire contemporaine, ce que l’on a pu observer, c’est une inquiétante continuité de la violence, des violences ordinaires aux violences extraordinaires. Une continuité si communément admise (la banalité de ce Mal relève du caractère laïc de l'Etat), que l’on ne comprend pas comment, aujourd’hui, tant d’intellectuels peuvent s’y vautrer, à moins de se faire les complices conscients de ce déplacement auquel l’Etat contemporain procède quand il use de violence, en la rendant admissible, pourvu qu’elle concerne des victimes acceptables...

 

image : Le camp de concentration pour Tsiganes de Montreuil-Bellay. Pour mémoire, en février 1940, les nazis testaient le Zyklon B 0 Buchenwald sur 250 enfants tziganes. En décembre 1942, Himmler signait le décret de Déportation des tziganes d'Allemagne vers Auschwitz, au "camp des familles gitanes". Selon les historiens, entre 500 000 et 700 000 tziganes ont été assassinés sous Hitler.

Et photo anthropométrique, tirée de l'exposition qui a eu lieu à Lyon à partir de l'été 2007, au sujet de la déportation des rroms français sous Pétain. Pour mémoire, en 1942, l'Allemagne nazie déportait et exterminait quelques centaines de milliers de tziganes. La France pétainiste durcissait alors sa position à l'encontre des gens du voyage, déjà sous haute surveillance depuis le début du siècle.

 

 

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