«Le boson de Higgs, c’est l’horloge des anges ici-bas», Etienne Klein…
15 Décembre 2013
, Rédigé par texte critique
Publié dans
#essais
Comment l’idée du temps s’est-elle imposée à nous ? Car le temps physique ne ressemble pas du tout à ce que nous percevons de lui. C’est l’un des mystères sur lesquels se penche avec un rare talent Etienne Klein, ouvrant les pistes, guidant la réflexion sans jamais la clore à la hâte. Le temps physique ne se confond pas avec le changement. Il est même ce qui ne change pas. Et quant à la flèche du temps, elle ne serait pas une propriété du temps, mais du phénomène temporel tel qu’il se donne à vivre. Alors ? Quid du temps, qui semble si bien se suffire à lui-même… Au point que si l’on imaginait de débarrasser l’univers de tout ce qui l’encombre, nous resterions convaincus de n’y trouver au final que du temps… Mais de quelle substance serait-il fait ? Pourquoi ne pouvons-nous donc pas ne pas supposer que le temps existe par lui-même, indépendamment des choses et des processus ? Et ce, malgré Einstein qui, dès 1915, sut si brillamment déconstruire l’idée substantielle du temps ? Au passage, quelle leçon de physique nous donne Etienne Klein, refondant la vulgate de la gravitation universelle, dont nous pensons tous qu’elle est une force qui surgit entre les objets de l’espace, quand elle n’est qu’une déformation de l’espace-temps. Allez le dire aux écoliers, qui apprennent le contraire : la terre ne subit aucune force, elle file en ligne droite dans l’espace plutôt qu’elle ne tourne autour du soleil. Mais comme l’espace-temps est courbé à cet endroit, sa ligne tourne… L’espace-temps, nous continuons ainsi de le croire primitif, alors qu’il est secondaire par rapport aux événements. Et Klein de préciser l’enjeu de cette réflexion, qui n’est rien moins que d’obliger à réinventer la physique, pour concevoir entre autre un espace-temps peut-être granulaire, peut-être discontinu, discret, ou n’apparaissant qu’à certaines échelles… Fascinantes réflexions ! Toute la question désormais étant de savoir si la question du temps est physique, ou non. Car si elle ne l’est pas, si c’est notre appareil cognitif qui la produit, alors le temps ne sera plus l’affaire de la physique mais celle des neurosciences. Que le temps soit complètement découplé de l’évolution, voilà qui ouvre de belles promesses… Quant au pari de la physique, d’expliquer le réel par l’impossible, il pourra s’en libérer et porter ailleurs son impertinence.
ÉTIENNE KLEIN - LE TEMPS, Du point de vue scientifique et philosophique, Frémeaux et Associés, 2 CD, Label Frémeaux et Associés, production françois lapérou pour arte filosofia.