La Puissante poésie de l’école…
10 Octobre 2014
, Rédigé par texte critique
Publié dans
#en lisant - en relisant
Camus. Le Premier homme. Ce manuscrit d’Alger. Jacques, l’écolier. Et Pierre. L’un blond, l’autre brun. Et Monsieur Germain, ce professeur qui aimait passionnément son métier. C’était l’époque des petits encriers de porcelaine à tronc conique. Monsieur Germain tirait dès qu’il le pouvait de son armoire à trésors son herbier, ses minéraux, une lanterne magique qu’il préférait aux manuels exotiques qui parlaient de neige aux enfants des sables, ou de bonnets de laine. Camus, face à la puissante poésie de l’école, se rappelle l’ère révolue des plumiers, de l’encre violette au goût âcre, confie-t-il. Camus sensible à la misère que les jeunes algériens vivaient tout autour de lui, cette misère qui «est une forteresse sans pont-levis». Dans la classe de Monsieur Germain, on nourrissait la faim de la découverte. «Dans les autres classes, on leur apprenait sans doute beaucoup de choses, mais un peu comme on gave les oies. On leur présentait une nourriture toute faite en les priant de bien vouloir l’avaler. Dans la classe de Monsieur Germain, pour la première fois ils sentaient qu’ils existaient et qu’ils étaient l’objet de la plus haute considération : on les jugeait dignes de découvrir le monde». Monsieur germain «les accueillait avec simplicité dans sa vie personnelle, qu’il vivait avec eux». Des générations d’enseignants ont puisé là leur raison d’être professorale.
Le premier homme, Albert Camus, Gallimard, Folio, janvier 2000, 380 pages, 7,40 euros, ISBN-13: 978-2070401017.