LA GRECE ASPHYXIEE, L’EUROPE AU BORD DU GOUFFRE…
Sitôt entré en vigueur, le Traité de Lisbonne aurait dû être réformé de toute urgence, ne serait-ce parce qu’il interdisait aux pays européens de venir en aide à l’un des leurs… La Banque Centrale européenne s’y refusait et s’y refuse toujours, obligeant de facto les pays endettés à emprunter sur le marché, qui est précisément l’acteur de leurs déficits ! En s’interdisant de jouer le rôle que partout ailleurs les banques centrales jouent, celle-ci a introduit un incroyable effet pervers, encourageant les spéculateurs –des banques pour l’essentiel, européennes qui plus est- à parier contre les pays européens ! On a bien improvisé en catastrophe un Fonds de stabilité financière pour faire face aux dettes de la Grèce, de l’Irlande, etc., en violation du reste avec le Traité de Lisbonne ainsi que l’Allemagne ne s’est pas fait faute de le dénoncer ! Mais un fonds qui a conduit à pérenniser la tutelle des intérêts privés sur les politiques économiques et sociales des Etats européens ! L’obsession néo-libérale des européens, en effet, en imposant aux Etats la discipline des marchés financiers, n’a rien fait d’autre que de les enfermer dans une logique de tutelle. Une logique qui aura au moins permis de révéler une chose : c’est que les marchés ne sont jamais efficients, jamais rationnels et qu’il est aberrant de leur confier sa tutelle économique et sociale ! Aberrant ou bien monstrueux, politiquement, un calcul à tout le moins machiavélique puisqu’il permet aux spéculateurs de ne jamais cesser de s’enrichir, en pariant toujours contre les Etats européens, la crise financière n’ayant d’autre origine qu’une spéculation éhontée des banques européennes elles-mêmes contre l’Europe, provoquant artificiellement le déficit de ces mêmes Etats. Et c’est sur ce marché financier que l’Europe politique exige que l’on finance les déficits qu’il a provoqué ! En Irlande tout comme en Grèce, les plans d’austérité qui ont jeté dans la misère des millions d’européens, ne visaient pas à autre chose que de renflouer des banques pour que leurs frasques ne coûtent pas un centime à leurs créanciers. En Grèce, le FMI de DSK a imposé privatisations, baisse généralisée des salaires, facilités de licenciement, bref une économie de survie pour garantir à ces mêmes créanciers le remboursement de leurs frasques, avec intérêts ! En mars 2011, le Conseil européen n’en a tiré évidemment aucune conclusion lucide, au contraire, les chefs d’Etat se sont entendus pour enfermer l’Europe dans une impasse sous couvert de renforcer le Pacte de stabilité, imposant partout des coupes sombres dans la Dépense Publique. Mais ne voit-on pas que la financiarisation débridée des économies européenne est un crime, ainsi que l’affirment la centaine d’économistes signataires du présent volume, tous experts à des degrés divers auprès de l’UE : celui des peuples européens. Ne voit-on pas la folie, sinon la malhonnêteté qu’il y a à penser que le marché financier peut garantir une quelconque stabilité, la spéculation provoquant par nature des crises et des déficits, des hausses des prix des matières premières et agricoles ? Or que nous demande-t-on en échange, sinon d’être solidaires de cette spéculation et de l’enrichissement des plus riches ? Pour réduire les déficits publics, commentent nos experts, il faudrait au contraire accroître la taxation sur les revenus financiers, sur les plus-values et les hauts salaires, dont le gonflement est l’une des causes de cette crise ! Il est urgent de changer l’Europe, affirment-ils… On veut bien le croire ! --joël jégouzo--.
Les économistes atterrés, 20 ans d’aveuglement -L’Europe au bord du gouffre, ouvrage coordonné par Benjamin Coriat, Thomas Coutrot, Henri Sterdyniak, éditions Les Liens qui libèrent, mai 2011, 173 pages, 9 euros, EAN13 : 9782918597322.