La France forte, les français lessivés…
Une France forte… L’assignation vaut son pesant de cacahuètes.
Une France forte, celle qui existe déjà, celle qui gagne : celle de Nicolas Sarkozy, Président de la République avec ses +172% d’augmentation en 2008, quand pendant ce temps, 5 millions de français se contentaient de vivre du SMIC.
Une France forte, celle qui gagne, celle de Jean-Paul Agon, PDG de l’Oréal avec ses 10,7 M€ de revenus annuels. Celle des 32 million d’euros remboursés à Liliane Bettencourt par le fisc en 2010, mais non pas celle des 1000 chômeurs supplémentaires par jour depuis que Nicolas est Président.
La France forte, celle qui gagne, celle des 75 milliards de cadeaux fiscaux aux plus favorisés.
La France forte, oui, mais de ses 36% d’augmentation du chômage des cadres entre 2008 et 2010.
De ses 27% d’augmentation du chômage des ouvriers au cours de la même période.
De ses 28% d’augmentation du chômage des employés au cours de la même période.
De ses 36% d’augmentation du chômage chez les plus de 50 ans au cours de la même période.
De ses 13,5% de pauvres.
De ses 20% d’augmentation du nombre de pauvres depuis 2002.
De ses 14 années de smic supplémentaires encaissées par les 0,001% de français les plus riches entre 2004 et 2008…
La France forte d’une amoralité sordide masquant à peine que sous le cadavre de la France d’en bas repose une plage, une vraie, où les nantis se dorent la pilule.
Et demain, la France plus forte encore… L’horreur est donc à venir. Notre seul avenir commun, semble-t-il, tant cette France est forte de sa surdité étatique.
Superbe pied de nez au demeurant, d’une France d’en bas ruinée par une certaine idée néo-libérale de la Nation française ! "Ruinée" : cela dit assez que la France d’en haut voudrait imposer un cheminement pseudo éthique à l’opinion, en demandant aux plus désespérés de garder une conduite exemplaire ! Enorme mystification : car l’option morale est en fait une option politique au sein de laquelle l’intolérance est devenue la norme. Une norme institutionnalisée par l’Etat lui-même !
Une France forte… Payons-nous de mots à défaut d’euros…
Mais comment ne pas reconnaître le caractère imaginaire des objets qui nous sont proposés pour "faire France", par un président au bout de son propre rouleau ?
Voyez-le évoquer cette fiction sordide : il faut obliger les chômeurs à se former… Quand le même homme n’a cessé de détruire le marché de l’emploi.
La France, mais de quel enracinement national nous parle-t-il donc, à ne cesser de convoquer une pseudo réalité sociale tronquée.
Quelle fiction sa France ! Voyez comme il produit cette fiction, goûtez la merveilleuse manipulation d’une vraie crise dont les conséquences ne portent que sur l’immense majorité du Peuple de France. Que dire de ces bouffées énonciatives, sinon qu’elles jouent pitoyablement de l’effet de réel mais que dans le même temps, elles ne font que bâtir une fiction qui n’articule qu’un récit hypocrite.
La France forte. Mais pas les français. Voyez combien ce discours nous écarte, nous aliène, nous déplace sous une fallacieuse contingence géographique au demeurant très floue, aux contours incertains, repliée à l’intérieur de frontières qui sont tout, sauf naturelles… Voyez combien ce discours s’avère n’être qu’une vaste conspiration contre toute espèce de vie sociale. Car lorsque le discours public ne sert qu’à proférer avec un tel aplomb des arguments aussi spécieux ou à rendre honorables des idées ignobles, dont celle qui tend à faire des chômeurs les coupables de leur situation sociale, ce qu’il y a au bout, c’est bel et bien la mort collective.
Le populisme noir donc, pour ultime vérité d’un Peuple fossoyé. Une pathologie sociale terrifiante pour bilan, où le monde des citoyens de la France d’en bas a lentement pourri. La France d’aujourd’hui ? Une foule tragique, forclose dans ses gestes de désespérés. Un vrai crime pour exclus, que ce roman noir de la société française contemporaine. Un vrai crime d’Etat.