L’IMMIGRE ET LE CAMPANILE : UNE HISTOIRE DU DISCOURS SUR L’AUTRE
2 Décembre 2009 Publié dans #IDENTITé(S)
Lorsque l’on se mêle de raconter sa vision de l’étranger, voire sa vision de soi, l’on devrait toujours prendre la précaution de relire l’ouvrage de l’universitaire palestinien Edward Saïd.
Le portrait que nous prétendons dessiner de l’Autre n’est en effet généralement qu’une plaisante caricature, sinon la triste apologie négative de sa propre image.
D’une image au demeurant nourrie souvent sans que l’on sache trop comment, ni de quoi. Si bien qu’on ne fait en réalité que parler d’un drôle de soi, aux curieux contours de peurs et de fantasmes mal digérés, de satisfactions et de doutes mal informés, voire carrément stipendiés quand il s’agit de construire cette image de soi à partir d’un ensemble plus grand (national), tout comme de l’insérer dans cet ordre douteux d’une prétendue Histoire nationale. La lecture de Saïd aide ainsi à ne pas raconter trop de sottises… Car dans son livre, l’universitaire palestinien étudie l’orientalisme comme type de discours que notre société a tenu (et tient encore) sur l’autre, autant que sur elle-même. Certes, il s’agit de ceux portant sur l’homme du Proche et du Moyen-Orient, principalement musulman et arabe. Mais la pertinence de la méthode a fini par constituer la matrice de ce genre d’étude.
Or cette histoire du discours sur l’Autre est proprement édifiante : sa différence lui fut toujours refusée.
De l’orientalisme universitaire au discours raciste ordinaire, un seul mot d’ordre : taire l’Autre.
Même "positif", son modèle aura été celui de l’homme blanc de Kipling. Etre blanc, depuis lors, n’est pas autre chose que d’entrer dans un processus d’auto-confirmation de ce très vieux modèle colonial. Au cœur de ce procès, la distinction d’un concept à partir duquel l’homme blanc prédit l’Autre, cet Autre dont il croit qu’il lui revient "naturellement" la charge de le définir, puisqu’il prétend disposer des concepts adéquats, avec ce style si caractéristique d’une rhétorique aux jugements définitifs, ornés d’éblouissantes descriptions narratives…--joël jégouzo--.
L’orientalisme, Edward Saïd, traduit de l’américain par Catherine Malamoud, préface de Tzvetan Todorov, éd. du Seuil, coll. La couleur des idées, oct. 2005, 422p., 24 euros, EAN : 978-2020792936
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