FAISEURS ET DEFAISEURS DE VILLE…
6 Mai 2010 , Rédigé par texte critique Publié dans #essais
A l’heure du chantier du siècle, celui du Grand Paris, sans doute les publications vont-elles se multiplier sur la question de la ville et de son urbanisme. Voici une première étape en quelque sorte, celle d’un ouvrage destiné au grand public, qui permet de faire le point sur ce qu’aura été la science de la ville depuis son émergence, autour des années 1850. Etape en forme de portraits de concepteurs de villes, vingt-six au total. Urbanistes, aménageurs, vingt-six portraits qui racontent l’histoire de l’urbanisme occidental moderne, accompagnant les processus d’urbanisation nés de l’industrialisation, de l’exode rural et de la généralisation des transports, c’est-à-dire, de fait, celui d’une science destinée à contrôler le redéploiement géographique d’une Nation.
Pas de périodisation ici, mais un classement alphabétique, peut-être un peu commode et faisant l’impasse sur une histoire beaucoup plus riche que celle des simples faiseurs de ville.
Tout de même, de quoi irriguer les interrogations qui se posent à l’aube de villes nouvelles et du tentaculaire Grand Paris.
On s’intéressera ainsi particulièrement au chapitre consacré à Haussmann, qui s’ouvre sur le paradoxe d’un homme de pouvoir détruisant Paris au prétexte de résoudre ses problèmes de circulation et d’hygiène, sans parvenir vraiment à les résoudre… Reste une architecture que le monde entier semble nous envier, et une communication qui vaut le détour, le Pouvoir en place à l’époque ayant multiplié les descriptions de Paris comme ville taudis pour justifier ses interventions autoritaires.
Reste pour nous encore aujourd’hui le décryptage de la ville-système de Haussmann, dont le paradigme de régulation, destiné essentiellement à relier les lieux de mouvement (gares), aux lieux de loisirs (théâtres, opéras), et à ceux de l’administration moderne, autorisait la bourgeoisie urbaine à s’approprier Paris comme son devenir propre. Et reste le syndrome Haussmann prenant le pouls d’un corps malade –la ville-, mis en chiffre par la statistique urbaine, mais supprimant la dimension humaine de ses préoccupations –sinon sous la forme d’un contrôle plus aisée des classes populaires. Syndrome aujourd’hui actualisé sous la forme de méga-objets techniques -gares, grande bibliothèque-, imposant leurs logiques fonctionnelles et formelles délestées de l’humain. Alors après Haussmann, peut-être pourrions-nous penser à intégrer enfin l’ordre des utilités techniques dans celui des aspirations humaines, un retournement qui ferait de l’échelle de proximité la dimension première de l’aménagement urbain…--joël jégouzo--.
Les faiseurs de ville : 1850-1950, collectif sous la direction de Thierry Paquot , Infolio éditions, collection : Archigraphy poche, février 2010, 510 pages, 12 euros, ISBN-13: 978-2884745765.
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