ET MAINTENANT LA PEUR : LA NATIONALISATION DU FN…
La langue de Nicolas est vulgaire.
Sa vulgarité est une vulgarité de principe.
Le Pouvoir aidant, elle est devenue la langue d’un groupe social, une dégaine affichant avec familiarité les signes de sa puissance.
La langue d’une poignée d’hommes qui ont fait main basse sur tous les domaines de la vie privée et publique, pour y trousser leur immoralisme fat.
La langue de Nicolas est pauvre et monotone. A dessein, pour ouvrir grand les vannes du populisme et du racisme, qui ne peuvent instruire qu’une faconde besogneuse, celle, précisément, de cousin Brice.
Aucune espèce de censure ne l’entrave. Cousin Brice n’est par exemple pas un polygaffeur maladroit comme on a pu le dire ici ou là, c’est un vrai zélateur. Confiant dans les pouvoirs de l’aparté que l’on jette en pâture à la vindicte médiatique.
Sa langue n’a aucune tenue, aucune rigueur, intellectuelle ou morale. C’est une langue de cantonade, fagotée de clichés orduriers.
Brice, en outre, n’a jamais rien de définitif à dire. Ni de bien défini. Il se reprend toujours. Car l’essentiel est là : de pouvoir se reprendre, de n’en finir jamais d’asséner ses inepties -sa seule ambition est de rabaisser au plus bas la morale de la Nation. C’est la raison pour laquelle ses propos sont à l’emporte-pièce. Une langue de remontrance, de sommation, de menace. Proférée sans répit. La langue du charlatan qui vous retient par la manche devant son étal. Excluant vigoureusement de son champ tout dialogue. Une langue verrouillée, cadenassant en soliloques inconvenants les bruits du dedans. Car dehors ne doit pas exister. Ce à quoi vise cette logorrhée, c’est de supprimer tout dehors. Qu’il n’y ait plus au-dedans de l’espace national qu’une Nation unanime. La société française l’ennuie donc. Sa langue rêve d’une communauté nationale reployée… on ne sait trop sur quoi, au juste.
Cette langue est de surcroît une imposture politique calculée. Articulée par un fanatisme sécuritaire qu’elle pensait subtil et qui l’enferme soudain : d’aucuns commentateurs prédisaient que Nicolas nous avait débarrassé du FN. Il n’en est rien : il est aujourd’hui condamné à se front-nationaliser lui-même, voire à nationaliser le FN sous peine de disparaître. Mais comment pourrait-il disparaître ? Il le pourrait, qu’il ne le voudrait pas. Voilà qui fait froid dans le dos : on n’en finira donc pas, de cette langue cousue d’abîmes ? Car derrière cette langue, il n’y a rien. Non : elle abrite beaucoup de rancune. Son périmètre est celui du mépris, de la haine et de l’hystérie. La France sera un monceau de ruines qu’elle rutilera encore d’esbroufes et de promesses cataleptiques. Avant de finir par montrer ses crocs (de boucher, qui valent bien le "Il faut que je leur passe l’envie de rire", de Hitler).
Mais les temps de la gueule de bois ont commencé. La falsification du langage ne peut durer qu’un temps. La langue de l’esbroufe est tôt ou tard rattrapée par son propre bruit. Celui du déictique "(Moi), Je" (jamais si peu de pensée n’aura identifié autant d’égocentrisme).
Que restera-t-il de la langue du Kärcher ? L’anachronisme monstrueux du racisme qu’elle libéra. Une orientation hallucinée. Nicolas avait pour lui la ténacité d’une cause mauvaise. Voilà que Brice nous révèle le syllabus de ce parler : le vocabulaire de la haine –du monde arabe, faut-il le préciser… Une haine qui la fait ressembler aux langues des revanchards. Langue des servilités à venir, dans l’impudente grossièreté des approximations que profère cousin Brice. Demain le dernier acte : le pire est à venir, n’en doutons pas. Car ils ne peuvent renoncer. Ils ne le peuvent pas, parce qu’ils ne savent tout simplement plus comment faire : ils ont remis en selle la bête immonde. Alors même si, et toute proportion gardée, tout comme Hitler restait pour Klemperer le grand mystère du IIIème Reich, Nicolas devient celui d’une Ve déclinante, il ne servira à rien de se demander comment un type pareil a pu accéder à la magistrature suprême. Il faudra l’en déloger. Et ce ne sera pas facile.—joël jégouzo--.
Lti, la langue du IIIème Reich, de Victor Klemperer, Pocket, coll. Agora, nov. 2003, 375 pages, 9,50 euros, ISBN-13: 978-2266135467