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La Dimension du sens que nous sommes

Eloge de l'Oisiveté, de Bertrand Russel

16 Octobre 2014 , Rédigé par texte critique Publié dans #essais

 

Russel-l-oisivete.jpgAvec ce livre écrit en 1930, l’éditeur poursuit son propre éloge de la paresse, pour installer une véritable collection. Et dans ce livre comme dans les autres, c’est «la morale du travail de l’Etat esclavagiste» qui est stigmatisée, l’oisiveté cultivée étant supposée nous en libérer. Mais ce que ne voyait pas Russel, c’était que travail et loisir formaient un système. Le temps social d’avant la fabrique, par exemple, était un temps poreux, ouvert à l’interruption fortuite ou récréative. Le temps du manœuvre, discontinu et souvent inscrit dans une logique domestique, ne connaissait ainsi ni le travail, ni le loisir. Avec la Révolution industrielle est apparu un nouvel usage social du temps, dont le travail devint le référent absolu. Le temps libre, hors fabrique, s’est ainsi organisé sur son modèle. De fait, la mouvance socialiste, tout comme la bourgeoisie réactionnaire, ont défendu une même conception du loisir ouvrier, comme temps disponible à l’éducation. Il faudra attendre les années 1950 pour que s’affirme une conception ludique des loisirs, toujours suspecte d’être débilitante. La notice du traducteur de Russel renvoie à la même problématique. S’inquiétant de l’inexactitude du terme de loisir, auquel il préfère la notion antique d’otium, il ne fait que réactualiser la suspicion du XIXe siècle à l’égard du divertissement non cultivé. Russel ne fait pas exception. S’il combat la morale du travail, c’est au nom d’une morale aristocratique qui vante les valeurs de la distinction, source de l’épanouissement de soi.

 

Eloge de l'oisiveté, Bertrand Russel, éditions Allia, 26 janvier 2002, 38 pages, 6,20 euros, ISBN-13: 978-284485083.


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