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La Dimension du sens que nous sommes

Dosta ! Voir les Rroms autrement, Michaël Guet

13 Mai 2014 , Rédigé par texte critique Publié dans #Politique

Dosta-les-rroms.jpgMichaël Guet est en charge du Comité européen intergouvernemental d’experts sur les questions rroms. Devant la situation faite aux rroms en Europe, il a éprouvé le désir de remettre les pendules à l’heure pour rétablir la réalité les faits et les chiffres les concernant. Un florilège contre les idées reçues particulièrement décapant, jugez-en vous-mêmes…
 
Qui saurait affirmer par exemple que 85% des rroms européens sont sédentarisés ? Que 87% d’entre eux ne sont pas d’origine roumaine ? Que les premières Lois d’exception les concernant ont été françaises, dont celle du 16 juillet 1912 par exemple, qui a longtemps régi le statut des gens du voyage, leur imposant de posséder un carnet anthropométrique fichant jusqu’au diamètre bizygomatique, ou la longueur des doigts et des coudées, et ce, dans la France de la IIIème République qui n’était pas encore celle de Vichy… Par parenthèse, qui saurait nous dire pourquoi les tsiganes internés par Vichy n’ont été libérés qu’en 1946 ? Qui saurait de même que l’abrogation de la loi de 1912 fichant les gens du voyage comme des criminels, ne date que de l’année 1969 ? Et que la Loi qui lui succéda n’en fut pas moins discriminante, leur imposant de disposer de trois titres de circulation qu’ils devaient faire contrôler à chacun de leur déplacement dans les gendarmeries ou les commissariats… Une approche sécuritaire sans équivalent en Europe. Qui saurait toujours nous dire que l’appellation «gens du voyage» est en fait une invention de l’Administration française qui date de l’année 1970, et qui désigne non seulement les rroms, mais tous ceux qui, de par leur profession, gens du cirque, des marchés, etc., sont appelés à vivre d’une manière itinérante ? Appellation dont l’usage fut entériné par la Loi du 5 juillet 2000, nouvelle Loi qui reconnaissait la caravane comme «habitation» soumettant ainsi les populations en disposant à la taxe d’habitation, mais ne les reconnaissant pas comme «logement», et leur interdisant de fait l’accès aux aides au logement…
Qui saura encore que ces Lois furent en partie abrogées par la Loi Besson de 2012, reconduisant pour l’essentiel les mesures discriminatoires à l’encontre de ces populations ? Qui saura du reste que cette Loi Besson de 2012 prévoyait un volet contraignant à l’égard des municipalités françaises, imposant à toutes celles de plus de 5 000 habitants de construire des aires d’accueil pour les gens du voyage ? Mais qui saurait dire que plus de la moitié des municipalités françaises sont aujourd’hui en infraction avec cette Loi, sans qu’aucune sanction ne soit prise à leur encontre, quand les préfets disposent, avec cette même Loi, de procédures accélérées pour expulser les rroms de leurs campements forcément illicites, puisque les municipalités françaises refusent de leur construire ces aires dont ces populations ont besoin… Et par parenthèse, qui saurait toujours nous dire pourquoi l’autre moitié des municipalités, dans son plus grand nombre, s’est contentée de terrains sans eaux ni électricité ?
Qui saurait nous dire encore qu’il n’existe en France que 17 000 rroms itinérants, soit 0,025% de la population française ? Contre 90 000 en Allemagne, 200 000 au Royaume-Uni, 70 000 en Italie…
Qui sait que la circulaire du 29 août 2012 adressée aux préfets ne parle pas d’intégration, mais d’évacuation des camps. Et que les familles expulsées n’ont d’autre choix que de s’installer dans des campements illicites, où le nomadisme le plus précaire leur est imposé ? Les rroms ne sont pas intégrables, prétendait il y a peu le ministre français de l’intérieur… Encore faudrait-il le leur permettre ! Mais les préfets, eux, se rappellent que les rroms arrivés en 1970 en France ont été parfaitement intégrés…
Pourquoi nul ne dénonce, au plus haut sommet de l’Etat, ces expulsions collectives, au mépris du Droit européen qui impose l’expulsion individuelle ?
En fait, nous dit Michaël Guet, le traitement des rroms en France préfigure du traitement des pauvres. Les rroms sont des pauvres mal logés visibles, qui nous font oublier qu’il existe 1 million de mal logés en France, et près de 9 millions de français qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté…
 
 
Dosta ! Voir les Rroms autrement, Michaël Guet, éditions de l’Aube, 3 avril 2014, 224 pages, 14,90 euros, ISBN : 9782815909761.
 
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