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La Dimension du sens que nous sommes

Dominique de Roux, par Alain Châtre

4 Octobre 2012 , Rédigé par texte critique Publié dans #en lisant - en relisant

 

de-roux.jpgTout m’avait semblé autrement plus beau dans un rêve inouï.

 

A Tristan, Pierre, Jo-Anne, Aurélien…

Du clan des immatures…

 

L’été si long cette année-là et à l’envers des regards –petits cadavres pour moi tout seul- les sanglots d’un combat perdu. La tristesses alors des vents du soir quand les mots se prennent à rêver loin devant nous.

Cher, très cher Dominique de Roux, deux ou trois photos dans la poche revolver de ma veste, petite trogne du côté des chiens, geu-geule massacrée de nos rêves rendus au ciel que plus rien ne nomme.

Pauvre attente alors des vents du soir dans les slows affligés de l’été et les petites jupes de la mer. Mais où s’en est-il allé l’adolescent fatigué, dans quel no man’s land, où il savait que tout est dit, en quel bouleversement biologique –Soldat blues à la terre retournée dans l’oubli des viandes lyriques.

Il y avait du martyr chez ce rêveur envoyé par Dieu sur la terre pour convaincre les hommes que seule la mort est désirable quand elle ne nie pas la vie «nudité jeune à jamais».

Son écriture trop belle pour être tout-à-fait de ce monde nous le dévoile bien plus que les repères d’une biographie toujours suspecte.

De la société parisienne au tam-tam angolais et dans le dépassement de la politique, elle assume héroïquement le deuil de quelques littératures imméritées.

L’apport de Dominique de Roux à moi-même ici truqué par la chimère, c’est la mort de Louis-Ferdinand Céline rattrapé au loin par sa romance et le somptueux Gombrowicz des derniers mois : est-ce un fou sur une case qu’on accule ?

Méditer tout cela –La longue agonie de Gombrowicz et son obsession juvénile : partir –quelqu’un d’autre –pas connu –retourner aux buissons jolis avec la déconnante des enfants qui bandent –tout refaire, quitter sa peau –galoper enfin petit cheval…

Dominique de Roux encore et toujours à Vence ce matin-là – au-dessous du balcon- estropié de sa foi, de ses principes, de sa littérature insubordonnée- épiant dans l’ombre la carcasse du maître – rejoint la révélation dont on ne sait plus quel secret invisible à l’œil nu : Witold Gombrowicz, vieux polonais rangé des bateaux et des rivages, accablé par la désertion de ses mots, de ses gueules et de ses gestes usés jusqu’à l’assassinat. Un signe de la main peut-être, quelques grimaces au rejeton et le circuit se ferme sur une pièce qui manque.

Ainsi jusque dans les années de sa mort ce garçon inconsolable, halluciné par les médicaments, les fatigues de vivre et la pudeur d’une peine inavouable, aura payé très cher la dignité d’être lui-même. Mais suffit –tu as bien fait de partir Witold Gombrowicz- Tu as bien fait de partir.

Alain Châtre (septembre 1996)

 

 

Dominique de roux - éd. l'âge d'homme - coll. les dossiers H,  collectif, dossier conçu et dirigé par Jean-Luc Moreau, sept. 1997, 522 pages, épuisé..

 

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