Et si je suis désespéré, que voulez-vous que j'y fasse ?, Günther Anders
20 Octobre 2022 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #entretiens-portraits
«La tâche morale la plus importante aujourd'hui consiste à faire comprendre aux hommes qu'ils doivent s'inquiéter et qu'ils doivent ouvertement proclamer leur peur légitime».
Peur du réchauffement climatique, quand le CNRS annonce qu'il sera pire que prévu en France.
Peur du climat politique, quand la classe politique française a glissé presque d'un seul homme à la droite la plus extrême.
Peur du climat médiatique, quand la presse comme un seul homme s'est mise au service des idées les plus rances.
Peur du climat social, quand nous ne savons plus espérer que dans la révolte de la jeunesse pour nous sauver de nos échecs. Voyez les lycéens en grève, jetés seuls en pâture aux forces d'un ordre barbare.
Peur du climat syndical, quand à force de compromis, presque toutes les centrales se sont vendues à l'ordre patronal.
Peur de la misère, peur du chômage, peur de la précarité, peur.
Alors il est grand temps de lire ou de relire ce philosophe juif allemand réfugié aux Etats-Unis dès l'accession de Hitler au pouvoir, qui comprit très tôt, quand toute la presse occidentale encensait le chef nazi (relisez les magazines et journaux de l'année 1933, ceux de France, ceux d'Angleterre, ceux des Etats-Unis, etc. ...), qu'il n'y avait au bout de ses lèvres que la destruction gourmande de l'humanité à savourer.
Günther Anders, c'est aussi et surtout l'homme qui a compris comment fonctionnait le libéralisme capitaliste, cette machine à broyer les vies et aux yeux de laquelle, «les armes sont les marchandises idéales» : les munitions ne servent qu'une fois et contraignent au rachat et à la production.
Lisez Anders, conscient de l'aveuglement dans lequel la civilisation bourgeoise aime à se bercer, son «telos blind» savamment entretenu et qui nous rend incapables de nous représenter ce que nous sommes vraiment.
Lisez Anders, dont la pensée fut marquée par l'irruption soudaine dans le champ de l'humanité, de sa destruction possible : Hiroshima et, déjà, la crise climatique qu'il pressentait à travers la destruction méthodique de l'environnement.
Sur ce dernier point, notait Anders, l'humanité était désormais confrontée à l'ultime impératif : non plus transformer le monde, mais le sauver...
Günther Anders, Et si je suis désespéré, que voulez-vous que j'y fasse ?, éditions Allia, traduit de l'allemand par Christophe David, septembre 2010, 1ère édition janvier 2001 pour la France, 6.10 euros, ean : 9782844853899.
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