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La Dimension du sens que nous sommes

Le New Deal Vert, Jeremy Rifkin

22 Avril 2020 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #essai, #essais

A prendre avec des pincettes, surtout quand l’auteur se met à encenser Cohn-Bendit et Merkel... Mais des idées cependant, et une analyse révélatrice de ce qui se trame dans les hautes sphères du pouvoir économique –rappelons que Rifkin est conseiller auprès du gouvernement chinois pour la transition écologique, et des Hauts de France... L’idée de départ nous est commune : le changement climatique va devenir le problème n°1 des Peuples. De tous les peuples du monde. Une sorte d’injonction indépassable, répondant parfaitement à l’assertion d’Hannah Arendt quand cette dernière affirmait que «pour la première fois dans l’histoire universelle, tous les peuples de la terre ont un présent commun », terrible : celui des tragédies environnementales qui se profilent dans un laps de temps très court. La sixième extinction des espèces n’a pas été prise au sérieux. L’avertissement était clair, mais la capacité de nos dirigeants à faire la sourde oreille a été sous-estimée. Désormais, c’est l’humanité qui est menacée. Inutile d’égrener ces menaces, du coronavirus aux méga incendies australiens ou brésiliens, de Tchernobyl au coronavirus. Nous avons douze ans, affirme Rifkin, douze ans seulement, pour faire marche arrière. C’est peu. Très peu. Irréaliste donc ? Rifkin ne le pense pas. Et le plus fort, même s’il réalise qu’il nous faut changer de modèle sociétal, c’est que selon lui nous le pouvons. Enfin, «nous», pas vraiment : il ne croit pas en une Révolution possible. Encore moins dans la mobilisation des Peuples, même si ça et là il affirme qu’il faudra bien, disons interpeler les populations citoyennes pour gagner cette bataille de la transition écologique. Pesons nos mots : ce New deal Vert au fond, ce n’est pas un consensus civilisationnel qui le portera. Quand on lit bien sa proposition, il viendra d’en Haut, comme toujours. Attendre l’investissement massif des populations dans ce combat serait trop long à ses yeux : répétons-le, il y a urgence et Rifkin sait bien que la pression populaire ne rencontrerait que l’opposition de cette vieille civilisation du carbone qui n’en finit pas de mourir mais qui pourtant se refuse à disparaître. Il est trop donc tard : impossible de se battre sur deux fronts à la fois, contre le capitalisme et contre les catastrophes : l’écosystème s’effondre sous nos yeux. Alors comment faire ? Nos seuls «alliés», selon Rifkin, seraient donc ceux qui disposent des leviers capables presque immédiatement d’opérer à cette transition : la finance. Les Fonds de pension ! L’idée est déroutante… Pragmatique, juge-t-il. La seule possible. Déjà le coût du solaire baisse si considérablement que dans quelques années, deux, trois, il sera inférieur à celui du pétrole, du charbon, du gaz, du nucléaire. Déjà la Chine est devenue le plus gros investisseur au monde dans ces énergies renouvelables (45% de la totalité des investissements mondiaux en énergies renouvelables est le fait de la Chine !). D’ici vingt ans, le pays le plus pollueur au monde pourrait bien devenir le moins pollué du monde…  L’effondrement de la civilisation du carbone est imminent. Même s’il reste encore trop d’actifs bloqués dans l’industrie pétrolière : il suffirait que les fonds de pension trouvent leur compte dans les énergies renouvelables pour que celles-ci s’imposent définitivement. Presque du jour au lendemain. Et Rifkin de rappeler qu’au sortir de la guerre de 39-45, il a fallu moins de 10 ans à nos sociétés industrielles pour  se restructurer autour du pétrole.  Plus loin en arrière, Rifkin évoque l’électrification des Etats-Unis, accomplies en moins de trente ans, entre 1900 et 1929. Le point de bascule sera donc l’effondrement financier de la civilisation fossile, quand les fonds de pension feront migrer leurs investissements vers les énergies renouvelables. Quelques simples décrets gouvernementaux pourraient y suffire. Et nous aurions glissé sans heurts vers ce capitalisme social que EELV nous promet… Mais… Rien n’aurait changé au niveau de la gouvernance des états, sinon, sans doute, qu’ils auraient eux aussi accompli leur transition vers des régimes autoritaires… Mais cette histoire, Rifkin ne la pense pas…

Jeremy Rifkin, Le New deal Vert, éditions LLL, traduit de l’américain par Cécile Dutheil De La Rochère, octobre 2019, 304 pages, 21.80 euros, ean : 9791020907622.

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