Le Monde des Grands Projets et ses ennemis, Serge Quadruppani
31 Mai 2018 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #Politique
Notre-Dame-des-Landes, Roybon, Sivens, voire le Grand Paris, Les J.O. 2024… Ce monde des Grands Projets assassins qui porte déjà mémoire du meurtre de Rémi Fraisse, de la main arrachée de Maxime, de ces innombrables mutilés et blessés de guerre dans les manifestations -puisque les armes employées sont désormais des armes de guerre. Le monde des Grands Projets destructeurs des milieux naturels, des milieux humains, de NDL à la vallée de la Suse, de Paris à Rome. Celui de la sauvagerie répressive, de l’énorme bêtise à front de taureau d’un capitalisme à bout de souffle qui ne cesse, pour se relancer, d’imposer ses desseins dévastateurs. A l’horizon d’une répression d’ampleur inédite, ce monde de l’extrême violence a pourtant trouvé en face de lui la levée d’un courage inédit, auxquelles les manifestations, réprimées avec de plus en plus de brutalité, ont donné pour nom le Cortège de tête. Un cortège fait de citoyens, non de «casseurs», décidés à endosser leurs responsabilités citoyennes malgré la hargne des CRS, malgré la hargne des médias, malgré la hargne des syndicats, malgré la hargne de l’état, malgré la hargne des partis réformistes dont l’échec est si patent qu’ils ont fini par révéler leur vraie nature : la confiscation, comme en 1936, de tout désir de changement réel. Un cortège de tête qui dit ce que nous savons tous, désormais, que toute compromission est impossible, que la confrontation est inévitable avec un pouvoir qui nous mène, tous, à la mort. Au suicide collectif. Un cortège de tête qui ressemble à une ZAD en fait, inventant jour après jour les solutions du basculement nécessaire, ce changement de civilisation sans lequel notre monde est foutu. «Le sentiment que l’humanité est au bord du gouffre est désormais un sentiment largement partagé», écrit Serge Quadruppani. Ne manque que l’explosion de colère contre ceux qui nous ont conduits là : ces réactionnaires réformistes, ces droites, toutes extrêmes en fait, les uns et les autres également porteurs des mêmes discours de haine sociale. Destruction du travail, destruction de la société, destruction de la planète, leur course à l’abîme nous engage. Et déjà, du fond de la terreur qu’ils instruisent partout, des mouvements ont surgi, que Serge Quadruppani a scruté avec attention. De NDL à Suse, de la Charte d’Hendaye au rassemblement de Bruxelles, une nouvelle manière d’être responsable est en train de se forger. Il n’y a pas lieu d’être pessimiste donc, mais lucide, et engagé, pour refuser la leçon de Fukushima par exemple, spectaculaire entre toutes, qui n’est pas d’empêcher les catastrophes à venir, mais de préparer les populations à les subir. Contre ces Grands Projets qui ne sont que des outils de gestion et de soumission des peuples, des mouvements de masse se sont faits jour, détonateurs d’une prise de conscience pour une société réellement nouvelle. Des foyers de créativité, de réflexion, de solutions où se retrouve ce peuple soit-disant introuvable dont on nous priait de faire le deuil. C’est là sans doute, dans ces Assemblées Constituantes mobiles, qu’il faut chercher une issue et des méthodes, plutôt que dans l’épuisement des forces sociales jetées dans l’érosion de la volonté militante à force de mouvements échelonnés.
Le Monde des Grands Projets et ses ennemis, Serge Quadruppani, Voyage au cœur des nouvelles pratiques révolutionnaires, La Découverte, mai 2018, 156 pages, 13 euros, ean : 9782707199225.
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