Il faut sauver la classe politico-médiatique…
Plus de 60%des français ont refusé de participer à la farce électorale proposée par le PS et les Républicains sous le titre : « faire cette année encore barrage au FN » -en attendant son remake l’année prochaine aux présidentielles... Plus de 60%, car au 50,09% d’abstentionnistes il faut ajouter les non-inscrits (« à peu près 3 millions », de l’aveu du Ministère de l’Intérieur –et on doit juste s’inquiéter d’une déclaration aussi imprécise), les votes blancs et les votes nuls. Ces 60% qu’aujourd’hui toute la presse s’emploie à stigmatiser, voire à rendre responsables d’une prétendue poussée du Front National (qui ne cesse en réalité de perdre des voix, plus de 400 000 très exactement entre 2012 et 2105, et qui de son propre aveu se trouve gêné dans sa progression par cette montée en puissance de l’abstention ou du refus de voter)… 60% des français en âge de voter ont donc refusé de voter, ce qui signifie que les trois partis concurrents ne représentent pas même le tiers des suffrages exprimés ! Alors pourquoi cette curée sur les abstentionnistes ? Pourquoi en outre tant de mensonges, comme le faisait France Inter il y a quelques jours, à nous faire croire que le FN rencontre l’adhésion de la jeunesse, quand 76% des français de 18 à 25 ans se sont abstenus ou ont renoncé à voter ? Pourquoi cette stigmatisation ? Pourquoi cette dramatisation ? Partout en France, avec l’appui des grands médias, l’on entonne le fameux couplet pseudo républicain : faire barrage au FN, réveiller les consciences, il s’agirait désormais de sauver… mais quoi au juste ? La démocratie ? Certainement pas : le système républicain autoritaire mis en place par Valls et Hollande est tout sauf démocratique. Une machine à confisquer la démocratie même. Non, ce qu’il nous faudrait sauver en fait, c’est la classe politico-médiatique, celle-là même qui depuis 40 ans nous assène jusqu’à la lie ses promesses de changement, murées dans la permanence de toute absence d’alternance politique. Haro sur l’abstention donc, qui serait la grande fauteuse, soit près de la moitié des électeurs, haro sur les non-inscrits que l’on oublie toujours au passage, haro sur les votes blancs, nuls, haro en somme, sur l’immense majorité des citoyens français qui ne goûtent plus la farce électorale que nous propose cette classe stipendiée que seuls ses avantages acquis sur nos défaites retiennent. Que faudrait-il sauver en somme, sinon ses avantages acquis ? Car à moins d’être aveugle, d’élection en élection, le seul constat que l’on peut faire, c’est que nos voix ne sont jamais prises en compte. Du coup, le moins que l’on puisse penser, plutôt que d’interpréter l’abstention comme une lâcheté politique ou le vote blanc comme refus des choix proposés, c’est que nous ferions mieux d’y voir un vrai geste politique : celui du refus du système représentatif français tel qu’il fonctionne, qui permet à un parti minoritaire de confisquer et la représentation nationale et le pouvoir exécutif (tout comme le pouvoir législatif grâce au furieux bidouillage de la programmation des élections législatives dans le sillage de l’élection présidentielle). Au fond, la réalité, c’est que la Vème République, conçue pour lutter contre le régime des partis, s’est muée en République des Partis. Alors certes, l’abstention ou le refus de s’inscrire sur les listes électorales, tout comme les votes blancs et nuls, ne traduisent pas un engagement politique. Ils pointent la place du vide effarant dans lequel est tombée l’irresponsabilité politique ambiante. Ils révèlent en outre une crise sévère, et par leur refus du système politique en place, ce jeu de dupe où le prétendu engagement qui consiste à déposer son bulletin de vote dans l’urne masque en réalité une passivité politique ahurissante dès la clôture du théâtre des élections. Ils révèlent ce grand vide dans lequel s’exerce le pouvoir politique. Un grand vide que rien ne comble, sinon des gesticulations obscènes et des éléments de langage hypocrites. Un grand vide qui rappelle au fond celui qui nous est apparu lors de la fin des dictatures de l’ex-Est, qui se sont écroulées sur elles-mêmes, sans révolution sanglante, dès lors que les peuples qui se trouvaient sous leur domination n’y croyaient plus. Surtout : ne croyaient plus à leur pouvoir de coercition. Si bien que cette Vème République à bout de souffle s’effondrerait comme un château de carte si nous lui tournions tout bêtement le dos.
De Charybde socialiste en scylla frontiste…
Ce sera pire après, nous dit-on et nous n’aurons qu’à nous en prendre à nous-mêmes… Ce sera pire en effet : un cran de plus. La presse, qui n’était déjà plus vraiment libre mais aux ordres des nantis deviendra lige, mais cette fois au grand jour, sans avoir à le cacher, libre de dévoyer ce qu’aujourd’hui elle minaude. Ce sera pire, mais à tout prendre plein de promesses pour les lendemains du PS et des Républicains, qui en connaissent déjà le scénario : après quelques années sinistres, ils reviendront au pouvoir, portés par une liesse fabriquée à nouveau à l’emporte-pièce par une presse servile, toujours prête à se jeter aux pieds de nouveaux maîtres. Et tout recommencera comme au bon vieux temps : un coup à droite, un coup à gauche, avec non moins assuré le retour de ce bon vieux racisme d’état qui permettra au FN de prendre de nouveau le pouvoir. La seule chose qui change au fond, c’est que c’est un jeu à trois désormais, et non plus à deux. Pour l’heure donc, il faudrait sauver la classe politicienne, qui s’imagine la seule classe sociale indispensable à la nation française. Un entre-soi odieux, qui chaque jour révèle des pans de son ignominie sans que les médias ne s’en émeuvent–ils sont à sa botte. Aux commandes, nous avons des gens cyniques. Des nihilistes. Rien de plus. Comment en est-on arrivé là ? La question est idiote : nous le savons bien, nous le savons tous, les 60% de français qui ne votent pas à tout le moins le savent, tandis qu’un dernier tiers s’accroche à son fantasme démocratique. Mais quand l’abstention triomphe à ce point, cela signifie que nos institutions n’ont plus aucune validité, ni aucune légitimité.