L’Hypocrisie républicaine du baccalauréat…
24 Juin 2015 , Rédigé par joël jégouzo Publié dans #Politique
Voilà, les dés sont presque jetés. Reste une épreuve et à attendre les résultats et pour certains candidats, à préparer la session la session de rattrapage. Baccalauréat en poche, nos chères têtes blondes pourront s’inscrire dans l’université de leur choix. C’est du moins ce qu’on aimerait nous faire croire : que le baccalauréat est un ticket d’entrée, un diplôme national, évaluant objectivement les élèves à leur mérite. Les mêmes conditions d’accès au supérieur pour tous… Dès la journée d’ouverture (c’est en effet un spectacle en France), la grand messe s’organisa autour de la fumeuse épreuve de philosophie, chaque canard y allant de son commentaire de comptoir de bar quand dans la réalité, l’épreuve ressemble plus à un devoir de scholastique qu’un effort de pensée...
Demain, cette même presse à l’enthousiasme infécond se hâtera de classer les établissements en fonction de leurs résultats au bac, le taux de mention venant ajouter en bêtise pour peaufiner la hiérarchie et ranger les lycées au mérite, lequel mérite récompensera in fine les lycées les plus «vertueux» pédagogiquement : ceux qui auront su accompagner une classe d’âge au bac sans être tentés de se débarrasser au passage de la seconde des élèves les moins «porteurs» en terme de réussite scolaire…
Mais la réalité est tout autre : en mai, les élèves savaient déjà s’ils étaient ou non reçus dans l’établissement supérieur de leur choix. La sélection s’était opérée déjà, bien avant l’obtention du fameux ticket, sur quatre trimestre exclusivement : les trois de classe de Première et le seul premier trimestre de Terminale. A l’exception des meilleures prépas de France, qui tiennent compte des résultats de seconde. Point final. Il suffit ensuite de présenter son diplôme pour concrétiser la décision.
Mieux : reçus sur dossier, les résultats de ces élèves n’est pas le seul critère «objectif» de sélection. Les établissements, qui ne sont pas dupes, savent qu’il existe des «différentiels» entre les lycées. Un 15 dans celui-ci ne vaut pas un 15 dans tel autre. Comment dès lors opérer dans un tel maquis de niveaux ? C’est très simple : les établissements fonctionnent désormais par réseau, ou reconnaissance du travail des équipes pédagogiques en place. De sorte qu’un élève sorti avec une mention très bien au bac, d’un lycée «non reconnu», n’a aucune chance d’entrer dans telle prépa réputée, faute d’être passé par le bon circuit. Bien sûr, il y a des exceptions. Peu nombreuses et seulement utiles pour justifier la prétendue égalité des chances. Dans cette gestion souterraine des cursus, les prépas dites «parisiennes» se taillent la part du lion, qui ne travaillent presque exclusivement qu’à partir de ces données finalement confidentielles. Au final, ce sont les établissements publics des beaux quartiers comme l’on dit pudiquement, et les établissements privés qui fournissent les meilleurs cursus : la gentrification des villes a achevé de peaufiner le paysage scolaire français, en confisquant les «meilleures» écoles de la république pour les privatiser. Le capital symbolique s’accorde au capital tout court, pour sanctionner une éducation française plus inégalitaire que jamais. Depuis une bonne vingtaine d’année, les sociologues répètent à l’envi que l’éducation en France est aujourd’hui plus inégalitaire qu’elle ne l’était il y a trente ans. Mais nul ne veut entendre ce discours déprimant et le bac continuera d’émerveiller une population convertie contre son gré par la classe dominante au sacrifice social.
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